Marcel HANDZEL

1934 - 1944 | Naissance: , | Arrestation: |

Marcel HANDZEL

I. La famille Herz à Medernach

La famille de Léonie, mère de Marcel, est originaire de Medernach, ville luxembourgeoise située dans le canton de Diekirch. Selon la généalogie établie par Marc Schoentgen[1] et que nous a transmise l’historien Georges Buchler[2], son père –  Lippmann Herz (1865-1943) – maquignon, se marie en 1895 à Medernach avec Rose Samuel (1869-1938). Les Herz, comme les Samuel, sont d’origine allemande[3].
Léonie – la plus jeune fille du couple Herz – a cinq frères et sœurs :

  • Silvain Herz (1895-1942), profession : représentant, marié en 1924 à Irma Kahn (1897-1942)
  • Sophie Herz (1897-1942) mariée en 1922 à Girschh Aronow (1888-après 1941), profession : forgeron
  • Julius Herz (1899-1942), profession : représentant, marié en 1934 à Simone Weill (1905-1944)
  • Tekla Herz (1901-1991) mariée à Adolf Haïm Evlagon (1890- ?), profession : inconnue
  • Bertha (1903-1942 ?) mariée en 1929 à Louis Rosenfeld (1889-1941 ?), profession : décorateur

Elle a également quatre neveux et nièces :

  • Roger Herz (1925-1942), Gaston (1928- ), fils de Silvain et d’Irma
  • Liliane Herz (1934-1944 ?), fille de Julius et de Simone
  • Flora Rosenfeld (1936-1942), fille de Louis et de Bertha

Arbre généalogique de la famille Herz


Selon les renseignements donnés par Laurent Moyse[4], sur dix-huit membres de la famille de Léonie, entre 1940 et 1944, seuls Tekla Herz, son mari Adolf Evlagon et leur neveu Gaston Herz échapperont à la déportation[5]. Gaston, cousin de Marcel Handzel, est toujours vivant et vit au Luxembourg. Une grande partie de la famille partira depuis le Luxembourg pour Litzmannstadt (camp de Lodz) en octobre 1941 mais deux couples et leurs enfants se réfugieront en France avant d’être déportés :

  • Silvain Herz, son épouse Irma Kahn et leurs fils Roger et Gaston partent pour Serécourt, dans les Vosges. Silvain, Irma et Roger seront déportés depuis Drancy en 1942.
  • Oziasz Handzel, son épouse Léonie Herz et leur enfant Marcel se réfugient à Sancé, en Saône-et-Loire.

II. Oziasz , Léonie et Marcel


Léonie naît le 3 septembre 1905 à Medernach.

Acte de naissance de Léonie Herz, Archives mairie de Medernach, Luxembourg

Eliasz Oziasz Handzel, fils de Mechel Handzel et de Riwka Uhrmacher, naît le 8 janvier 1899 à Przemysl[6] en Pologne[7] et il porte les prénoms de son grand-père maternel.

Acte de naissance d’Oziasz Handzel, Archives Nationales de Pologne

Selon l’acte de naissance d’Oziasz, ses parents ne sont pas mariés[8] et vivent au n°7 de la rue Jagiellonska. Oziasz a quatre frères et sœurs plus âgés que lui : Abraham Jakob (1887- ?), Hinda (1890- ?), Sara Zisla (1892- ?) et Cipora (1896-1942), tous nés également hors mariage mais reconnus par leur père, Mechel Handzel[9]. Nous n’avons retrouvé la trace que de sa sœur Cipora (de son nom d’épouse Rechtmann). Elle partira de Drancy par le convoi du 24 juillet 1942 et décèdera à Auschwitz le 20 août 1942[10].

Le n°7 où est né Oziasz Handzel

La rue était et est toujours une rue importante située au centre-ville, et qui longe la rivière San. Au n°33 se trouvait l’ancienne synagogue construite entre 1592-1594 et au n° 45 une autre synagogue – appelée Synagogue Tempel – dont la construction a commencé en 1889 pour se terminer en 1890. Malheureusement aujourd’hui les deux n’existent plus, l’une détruite pendant la guerre, l’autre juste après[11]

À cette date, le père, – Mechel Handzel –, exerce la profession de commerçant.
Après avoir vécu en Pologne, Oziasz Handzel s’installe – comme il est indiqué sur son acte de mariage – à Dresde (Allemagne) où il exerce la profession de commerçant, puis il arrive à Esch-sur-Alzette au Luxembourg. Là, selon l’historien-chercheur Georges Buchler, il ouvre en 1933 une confiserie située au 2 rue Xavier Brasseur : la Confiserie de la Poste.

Publicités pour la confiserie de la Poste[12]


Le  22 aout 1934, Léonie donne naissance à Marcel.

Acte de naissance de Marcel Handzel, Archives municipales d’Esch-sur-Alzette

Le couple vit tout d’abord au 77 rue de l’Alzette dans une maison appartenant au beau-frère de Léonie, Adolf Haïm Evlagon puis il déménage au n°17 de la même rue en octobre 1935. Ils tiennent là une confiserie de renom : la confiserie de l’Hôtel de ville[13].



La famille reste au Luxembourg jusqu’en mai 1940 date de l’invasion de l’Allemagne sur le territoire[14].
À cette date, selon le rapport final établi en 2009 de la commission spéciale pour l’étude des spoliations des biens juifs au Luxembourg pendant les années de guerre 1940-1945, le nombre de Juifs au Luxembourg est estimé à 3907[15]. Dès mai 1940, une série de mesures permettent la spoliation des biens juifs :

  • Obligation de faire une déclaration de fortune
  • Mise sous séquestre des produits alimentaires, des matières premières, des produits semi-finis, de l’or et des métaux précieux
  • Blocage des comptes bancaires avec possibilité de ne retirer que 250 Reichsmark par mois. Interdiction de payer en espèces.
  • Obligation de vendre ou de transférer à certaines banques devises et or avec indemnisation en Reichsmark[16]

Une commission administrative luxembourgeoise fournira en 1941 à la Gestapo le fichier des Juifs d’origine polonaise. Il ne restera plus à la Gestapo qu’à trouver les adresses des Juifs polonais : « Avec l’aide de ce fichier juif, les Juifs sont répertoriés, internés, déportés[17]. » Le nom d’Oziasz Handzel figure bien sur ce fichier[18] mais lui et sa famille auront le temps de fuir le Luxembourg.
En effet, partie vers la France[19] – avec environ 50 000 civils évacués par l’armée française – la famille Handzel ne peut emporter que 50 kg de bagages et ils doivent laisser aux Allemands « tous leurs objets de valeur[20]. » Quant à leurs biens, l’Administration civile allemande se donne le droit de les placer sous sa tutelle ou de les confisquer[21].

II.1. Arrivée des Handzel en France

Archives municipales Cluny, télégramme du préfet de Saône-et-Loire qui annonce l’arrivée des Luxembourgeois


Les Handzel, comme de nombreux Luxembourgeois, arrivent en Saône-et-Loire le 28 février 1941, et ils reçoivent une autorisation provisoire de trois mois pour y rester. Que s’est-il passé pour eux depuis leur départ du Luxembourg ? Peut-être sont-ils allés auparavant dans la Drôme, à Ancône plus précisément. Cette information nous a été donnée indirectement par Gaston Herz, seul survivant de la famille et cousin de Marcel[22].
Leur point de chute en Saône-et-Loire ? Sancé, tandis que Tekla – la sœur de Léonie – et son mari Adolf Haïm Evlagon vivent à Mâcon, rue Dombey.

Répertoire alphabétique des étrangers dans lequel sont recensés Haïm et Tekla Evlagon[23]

À Sancé, Marcel fréquente l’école primaire dès le 12 mars 1941.

Mars 2017 : photo de la mairie de Sancé où se situait l’école, photo, C. Fougerard

La famille vit rue de la Fontaine juste en face du lavoir.

Mars 2017 : photo de la maison des Handzel, photo, C. Fougerard

Mars 2017v: En face de leur maison, le lavoir où on faisait les lessives, photo, C. Fougerard


Selon Asher Cohen, il n’y a pas eu de de préjugés contre les Juifs dans les petites villes et les villages « contrairement aux gens des villes et surtout Paris. S’il y a eu antisémitisme, il se trouva parmi ces derniers[24]. »
Si Léonie et Marcel sont recensés « Juifs » ils sont cependant libres d’aller et venir dans la commune de Sancé. Mais rien de tel pour Oziasz puisqu’il intègre un groupe de travailleurs étrangers, celui de Pontanevaux.

II.2. Oszias au GTE de Pontanevaux

La loi du 27 septembre 1940, “Loi sur la situation des étrangers en surnombre dans l’économie nationale”, crée les “Groupes de travailleurs étrangers” ou GTE. Selon l’article 1er, « Les étrangers de sexe masculin, âgés de plus de 18 ans et de moins de 55 pourront, aussi longtemps que les circonstances l’exigent, être rassemblés dans des groupements d’étrangers s’ils sont en surnombre dans l’économie nationale et si, ayant cherché refuge en France, ils se trouvent dans l’impossibilité de regagner leur pays d’origine. » Les Juifs qui sont « dépourvus de moyens d’existence » sont incorporés dans ces groupes de travailleurs étrangers. À contrario, ceux qui ont des ressources sont, eux, regroupés dans des centres de résidence assignée. Ils doivent se faire pointer tous les quinze jours au moins et ils ont le statut de « travailleurs libres ».
Oziasz Handzel est intégré au 552e GTE[25] de Pontanevaux, situé sur la commune de Saint-Symphorien d’Ancelles, à une vingtaine de kilomètres de Sancé.

Camp de Pontanevaux, AP, M Audin

Incorporation d’Osiasz Handzel au 552e GTE de Pontanevaux[26]

La famille Handzel doit donc être considérée comme dépourvue de moyens d’existence. Il se peut qu’Oziasz ait travaillé pour la commune de Sancé et ainsi pouvait-il rentrer chez lui, tout en restant « sous surveillance ». D’après Simone et Raymond Burtin, Oziasz aurait en effet occupé dans le village le poste de cantonnier[27]. Selon les textes qui régissent le fonctionnement des GTE, l’épouse d’un interné doit percevoir environ 7 francs pour elle et 4.50 francs pour son enfant par jour – soit un total d’environ 11.50 francs par jour – pour subvenir à leurs besoins. La somme n’est pas importante et nous n’avons aucune source qui prouve que Léonie et Marcel aient touché le moindre subside. De ce fait, survivre – même avec un maigre salaire – a dû être le quotidien des Handzel, sauf si la famille est arrivée en France avec quelques économies[28].
Suite à la conférence de Wannsee en janvier 1942, Hitler décide des contingents de Juifs à fournir par la France. Pour l’Administration française, il s’agit tout d’abord de déporter les Juifs des grands camps de la zone libre, les incorporés des GTE entrés en France après 1936[29] et pour finir les Juifs arrêtés lors de la grande rafle d’août 1942.
Selon Cédric Brunier, « les membres des familles des GTE peuvent, s’ils le souhaitent, partir aussi ou on peut aussi les contraindre à partir[30]. » Or ni l’épouse d’Oziasz, ni son fils ne sont arrêtés à cette date. On peut donc supposer qu’ils n’ont pas été obligés de le suivre.
En vue d’un regroupement, les hommes du 552e GTE de Pontanevaux qui ne sont pas considérés comme des « travailleurs utiles à conserver » sont envoyés le 15 août 1942 au camp de Ruffieux, situé en Savoie. C’est ce qu’indique le document établi par la Préfecture de Mâcon au sujet d’Oziasz Handzel :

Liste des étrangers juifs entrés en France depuis 1933 et résidant en Saône-et-Loire, Archives départementales de Saône-et-Loire

Là sont rassemblés : 56 personnes du 974e GTE de Ruffieux, 104 personnes du 514e GTE de Savigny (Haute-Savoie) et 8 hommes – dont Oziasz  – du GTE de Pontanevaux. La plupart des prisonniers sont allemands, autrichiens, polonais et le seul Luxembourgeois est Oziasz Handzel[31].

Liste des prisonniers des trois GTE, Archives départementales de la Savoie 2017/D/297

Enfermés dans six wagons à bestiaux avec de la paille, un broc d’eau et un seau pour l’hygiène, les hommes partent avec une ration composée de deux boîtes de conserve de poisson, 100g de salaison, 50g de chocolat, 100g de confiture, 700g de pain, un demi-litre de vin, pour deux jours de voyage[32]. Le 24 août, ils partent de la gare de Culloz. Ironie du sort, leur train passera par Mâcon pour rejoindre le convoi principal qui se dirige vers Drancy. Or, à Mâcon, Oziasz n’est qu’à cinq kilomètres de sa femme et de son fils.
Leur convoi arrive, via Tournus, Chalon-sur-Saône, à Drancy le 25 août. Un jour plus tard, ils partent pour Auschwitz et Oziasz Handzel fait partie des 1002 déportés du convoi n°24. Il sera gazé le 8 décembre 1943[33]. Du convoi n°24, seules vingt-trois personnes ont survécu.

II.3. Léonie et Marcel après 1942


Marcel est inscrit à l’école du village le 12 mars 1941. L’enfant parle le français couramment, langue qu’il a apprise – comme l’allemand – à l’école primaire au Luxembourg[34]. Il suit la classe de M. Lubin, professeur qui sera présent lors de son arrestation ; décrit comme étant plutôt strict, l’instituteur faisait monter le drapeau tous les matins à ses élèves. Malgré tout, il n’abordera jamais la question de la guerre en classe.

Archives départementales de Saône-et-Loire, plan de l’école de Sancé

À l’école, Marcel est totalement intégré ; gentil garçon, calme et très bon écolier – il est très apprécié de ses camarades de classe ; après l’école il joue dans la commune avec les autres enfants. Comme le confie Raymond Burtin[35], « nous ne savions pas qu’il était Juif ». Pour les enfants de Sancé, c’était simplement un camarade de classe, un copain et c’est ce que les photos conservées par le couple Burtin montrent : un enfant comme les autres. Le plus petit de la bande des quatre.

1941, Marcel avec ses copains de Sancé : Jean Blampois, Roger Guillermin, Raymond Leboeuf, archives privées, famille Burtin

Assis, 3e garçon de gauche à droite : Marcel à l’école en 1943 avec son instituteur, archives privées, famille Burtin


En 1942, Marcel savait-il que son papa n’allait pas revenir chez lui ou espérait-il un jour le voir pousser la porte d’entrée de la maison ? Il a seulement neuf ans et sa maman n’a peut-être pas voulu détruire son rêve d’enfant, celui de pouvoir un jour retrouver son père vivant …
Quant à Léonie, elle fait des travaux de couture pour leur permettre de vivre. Nous savons qu’elle se rendait au ravitaillement chez les Cordier à Châtenay, un hameau de Sancé.

Document non daté : commande de 300 KG de bois par L. Handzel, Archives municipales de Sancé

Lorsqu’elle arrivera à Drancy, elle déposera 10 000 francs, somme qui correspond sûrement plus aux économies d’avant-guerre qu’au fruit de son labeur.

Dépôt d’argent et de bague en or par L. Handzel à Drancy, Mémorial de la Shoah

II.4. La déportation de Léonie et de son fils : convoi 77

Les troupes françaises et américaines débarqueront en Provence le 15 août 1944 et, entre le 4 et le 10 septembre, les villes de Saône-et-Loire seront libérées[36]. Ce sera trop tard pour Léonie et Marcel. Raymond Burtin n’a rien oublié des événements de ce jour tragique : le 5 juillet 1944, les Allemands débarquent dans la salle de classe de Sancé en plein cours du matin. Le maître se tient debout, pâle, sans dire un mot ; Marcel est appelé et est emmené sur le champ alors que sa maman est arrêtée chez elle le même jour.

Registre de classe, Sancé, 1944, Archives départementales de Saône-et-Loire. Dans la colonne « Observations » il est noté : « Arrêté par les Allemands »

Le motif de leur arrestation ? La Préfecture de Saône-et-Loire qui rédige son rapport dit l’ignorer…

Rapport établi par la préfecture de Mâcon, Archives départementales de Saône-et-Loire

Jusqu’au 31 juillet 1944, ils seront internés à Drancy. C’est là que Léonie dépose son argent et une bague en or, peut-être son alliance, dernier souvenir de son mari Oziasz. Elle et son fils partiront ensuite vers Auschwitz par le convoi 77 où ils seront dirigés vers la chambre à gaz le 5 août 1944.

III. Conclusion

Sur les 1374 Juifs luxembourgeois qui s’étaient réfugiés en France, 475 au moins ont été déportés et seulement 20% ont survécu à la déportation et « au moment de la libération, la communauté juive au Luxembourg avait pratiquement cessé d’exister. Suite aux mouvements de fuite, à l’émigration forcée et aux déportations effectuées par l’occupant, le nombre de Juifs avait passé de 3 907 en mai 1940 à seulement 70 en septembre 1944. (…) La Shoah avait profondément marqué l’évolution démographique de la population juive. En 1947, seulement 870 Juifs étaient recensés au Luxembourg[37]. »
L’arrêté du 7 septembre 2016[38] portant apposition de la mention « Mort en déportation » sur l’acte ou jugement déclaratif de décès de Marcel Handzel reconnaîtra qu’il est bien décédé à Auschwitz en août 1944.

Raymond et Simone Burtin, Thomas Loisier, Cloé Fougerard, 22 mars 2017, Sancé. Photo : F. Loreaud

À Sancé, Raymond Burtin ignorait, depuis 1944, le sort de son copain d’école.

IV. Et pour finir, la suite.

Pour terminer la biographie de la famille Handzel, nous avons eu l’honneur, le 12 mai 2017, de pouvoir échanger et de recevoir le témoignage émouvant de Gaston Herz, 89 ans, cousin de Marcel.
Roger Herz, le frère de Gaston naît au Luxembourg tandis que lui voit le jour à Metz où la famille était installée. Il tient à le préciser : pour son père, sa mère et son frère, ce sont bien les gendarmes français qui les ont arrêtés à Sérécourt (Vosges) où ils étaient réfugiés et ce, uniquement parce qu’ils étaient Juifs. Toute sa famille est dirigée le 18 juillet 1942 vers le vélodrome d’hiver tandis qu’il échappe à la rafle, caché dans une grange voisine. Il ne reverra plus jamais les siens, déportés à Auschwitz : « Je n’ai réalisé que plus tard, les sentiments de catastrophe d’une mère laissant un fils de 13 ans seul devant une maison fermée », écrit-il.
Les souvenirs de Gaston Herz sont diffus mais il se souvient qu’après avoir fui, il se retrouve embauché à l’hôtel Touring à la Bourboule comme garçon à tout faire puis il travaille en usine à la Séauve-sur-Semène. Fuir, se cacher, survivre.
Comment rejoint-il sa tante et son oncle Tekla Herz et Adolf Haïm Evlagon, nous n’en savons rien mais c’est à Sancé qu’ils se réfugient, pensant peut-être alors retrouver là Marcel, Léonie et Oziasz. Or les trois sont déjà déportés. Habitent-ils la même maison ? Gaston Herz ne se souvient plus de ce détail mais il se rappelle bien qu’il a été employé dans une boulangerie mâconnaise avec un patron qui n’a pas hésité un instant à exploiter un tout jeune adolescent en le faisant travailler quatorze heures par jour.
Enfin, la Libération, les drapeaux, la liesse. Mais est-ce une réelle libération pour celles et ceux qui ont perdu tous les leurs ?
Gaston Herz a rédigé ses mémoires pour ses enfants et petits-enfants, en leur expliquant la chance qu’il a eu dans sa vie, rien que de la chance d’être encore là et en bonne santé grâce à ses gènes que lui ont laissé en héritage ceux qu’il ne peut oublier. Sa descendance – écrit-il – est sa « revanche sur l’adversité » et le témoignage qu’il a accepté de nous livrer doit nous permettre « de mieux combattre le racisme, la xénophobie, l’antisémitisme et alors, poursuit-il, cette expérience n’aura pas été vaine. »

Plaque que Gaston Herz a fait poser en souvenir de sa famille, Medernach, Luxembourg

[1] « Die judische Gemeinde In Medernach. Einwanderung, Integration und Verfolgung » In Fanfare Medernach 1905-2005, Medernach 2005.
[2] Georges Buchler est historien-chercheur au musée national de la Résistance à Esch-sur-Alzette. Il nous a transmis de nombreux documents et renseignements sur la famille Herz-Handzel et nous l’en remercions vivement.
[3] Salomon Herz, père de Lippmann Herz est originaire de Bosen-Birkenfeld (Allemagne) et Rose Samuel de Freudenburg (Allemagne).
[4] Ancien rédacteur en chef de la Voix du Luxembourg, Laurent Moyse est l’auteur notamment « Du rejet à l’intégration – Histoire des Juifs du Luxembourg des origines à nos jours » aux éditions Saint-Paul.
[5] Décédés à Auschwitz : Silvain Herz, sa femme Irma et leur fils Roger (convoi n°11 parti de Drancy le 27 juillet 1942) ; Oziasz Handzel, sa femme Léonie et leur fils Marcel. Morts à Litzmannstadt par le convoi du 16 octobre 1941 parti du Luxembourg : Sophie Herz, Girsch Aronow, Julius Herz, sa femme Simone Weill et leur fille Liliane ; Louis Rosenfeld, sa femme Bertha Herz et leur fille Flora. Mort à Theresienstadt : Lippmann Herz.
[6] La ville est située au Sud-Est de la Pologne, proche de la frontière de l’Ukraine. Selon le site Wikipedia, « en 1931, la ville compte 62 272 habitants. En 1939, après l’invasion de la Pologne par l’Allemagne et l’Union soviétique, la ville de Przemyśl se trouve à la frontière séparant la zone d’occupation allemande de la zone d’occupation soviétique. Du 15 au 19 septembre 1939, 600 Juifs sont assassinés par les Einsatzgruppen dans le cimetière de la communauté juive lors du massacre de Przemyśl (de). De nombreux Juifs réussissent à passer dans la zone soviétique. En juin 1941, l’Allemagne nazie attaque l’Union soviétique et prend le contrôle de toute la ville. Le 20 juin 1942, un premier groupe de 1 000 Juifs de la région de Przemyśl est envoyé au camp de travail forcé de Janowska. Le 15 juillet 1942, les nazis créent un ghetto et y enferment 22 000 Juifs. Ils sont pratiquement tous exterminés à Auschwitz et à Belzec. La résistance polonaise et juive réussit à sauver 415 Juifs. Les archives allemandes révèlent que 568 Polonais de la région ont été exécutés pour avoir aidé des Juifs. » La ville est libérée de l’occupation allemande par l’Armée rouge le 27 juillet 1944.
[7] http://searcharchives.pl/56/1924/0/-/12/skan/full/BUKv6ikH6bvaK7BSDrDVGA
[8] Ils se marieront le 11 août 1901 et tous les enfants sont reconnus légitimes par le mariage.
[9] Renseignements donnés par Beata Mehl, 12 mai 2017.
[10] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000023761754
[11] Renseignements donnés par Beata Mehl.
[12] Documents transmis par Georges Buchler, historien-chercheur.
[13] Renseignements et photographies transmis par Georges Buchler, historien-chercheur.
[14] http://www.lessentiel.lu/fr/news/luxembourg/story/23237260 Sur les 3 700 Juifs qui résidaient au Grand-Duché avant la Seconde Guerre mondiale, 1 200 sont morts, victimes de la Shoah. 700 Juifs environ ont été déportés du Luxembourg vers les camps de concentration. Seuls 56 ont survécu.
[15] https://www.gouvernement.lu/844206/rapport_final.pdfDont 25.7% de Juifs luxembourgeois et 74.3% de Juifs non luxembourgeois. p. 12.
[16] https://www.gouvernement.lu/844206/rapport_final.pdf p. 17-18.
[17] Denis Scuto. La commission administrative et le fichier juif de la Gestapo » in https://orbilu.uni.lu/bitstream/10993/24622/1/20151119_Tageblatt_Scuto_Liste.pdf
[18] Idem.
[19] https://www.gouvernement.lu/844206/rapport_final.pdf 463 réfugiés arrivent aux Etats-Unis, 124 en Suisse, 102 à Cuba, 217 en Belgique et 1374 en France. p. 13.
[20] https://www.gouvernement.lu/844206/rapport_final.pdf p. 81.
[21] https://www.gouvernement.lu/844206/rapport_final.pdf p. 19.
[22] Nous n’avons pas pu vérifier cette information puisque les fonds des archives sont lacunaires, la préfecture de la Drôme ayant totalement été détruite par un incendie le 15 août 1944 suite au bombardement du pont sur le Rhône par les Américains.
[23] Archives départementales de Saône-et-Loire, 639W7.
[24] Asher Cohen. La Shoah. Paris, Le Cerf « Bref », 125 p.

[26] Archives départementales de Saône-et-Loire, W109287.
[27] Entretien avec Me et M Burtin, 22 mars 2017. Le couple Burtin a connu la famille Handzel à Sancé pendant la guerre.
[28] Voir ci-dessous, p. . Léonie Handzel dépose la somme de 10 000 francs à son arrivée à Drancy.
[29] Seront déportés également les Juifs entrés en France entre 1933 et 1936.
[30] Cédric Brunier, Les Juifs en Haute-Savoie de 1940 à 1944, Mémoires et documents de la Société Savoisienne d’Histoire et d’Archéologie, 2002, 227 p. 91.
[31] Idem., p. 95 et 134.
[32] Ibidem., p. 95.
[33] Selon l’historien Georges Buchler, « son décès est déclaré officiellement en 1950 à la date du 8 décembre 1943 à Byskowice (Gliwice). Autour de Gliwice sont localisés des camps annexes d’Auschwitz.
[34] Renseignements transmis par Laurent Moyse : « le système scolaire d’avant la Seconde Guerre mondiale reposait sur une réforme introduite par une loi de 1912, qui prévoyait l’enseignement des deux langues officielles de l’époque, à savoir l’allemand et le français (depuis 1984, le luxembourgeois est ancré comme langue nationale et officielle dans la législation du Grand-Duché, alors qu’il était considéré auparavant comme un dialecte et utilisé surtout oralement). Marcel Handzel a donc appris les deux langues à l’école, ce qui explique pourquoi il maîtrisait assez bien le français. »
[35] Entretien du 22 mars 2017, Sancé.
[36] La ville de Mâcon est ainsi libérée le 4 septembre.
[37] https://www.gouvernement.lu/844206/rapport_final.pdf p. 13-15.
[38] JORF n°0240 du 14 octobre 2016, texte n° 57. https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000033234895&categorieLien=id

Contributeur(s)

Chantal CLERGUE, conseillère principale d'éducation, Lycée la Prat's de Cluny, Chloé Fougerard, 1reES, Thomas Loisier, 2nde Fanny Loreaud, assistante d'éducation

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2 commentaires
  1. clergue 7 ans ago

    Nous sommes très fiers d’avoir pu contribuer au projet « Convoi 77 » et d’avoir pu, ainsi, écrire et rendre honneur à Marcel, Léonie et Oscar. Si nous avons pu retrouver trace du cousin de Marcel au Luxembourg, nous espérons que des membres de la famille d’Oscar, originaires de Pologne, pourront lire ces lignes et compléter notre travail.
    Nous organiserons à l’automne prochain une exposition sur la famille Handzel à Sancé (71).
    C. Clergue

    • Auteur
      Serge Jacubert 7 ans ago

      Merci beaucoup pour cette contribution. Nous transmettons votre remarque à Georges Mayer, notre président, qui est en relation avec des responsables polonais. Bien cordialement.
      Serge Jacubert

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