Allia SEBBAH

1940-1944 | Naissance: | Arrestation: | Résidence:

Allia SEBBAH (1940-1944)

Allia Sebbah est née le 2 novembre 1940 à Gonesse, en Seine-et-Oise (aujourd’hui le Val d’Oise).

Ses parents sont Isaac Sebbah, juif marocain, né à Casablanca le 14 juillet 1896, ouvrier étameur, et Jeanne Marie Feltin, née à Aubervilliers le 8 juin 1901.

Ils se sont mariés le 23 décembre 1922, à Aubervilliers. Jeanne Feltin était ferblantière au moment de son mariage puis n’a pas plus exercé de profession.

Allia est la benjamine d’une famille nombreuse : Eliane, née en 1926 ; Rolande Esther née en 1928 (morte en 1998) ; Albert Roger né en 1930 (mort en 1932 d’un accident domestique) ; Meyer Emile, né en 1931 (mort en 2016) ; tous nés dans le XIIe arrondissement de Paris. Roger Joseph, né le 26 septembre 1932 à Paris XIe, Maurice Isaac naît au Blanc-Mesnil en 1934 (décédé en 2001), et Simon Jean en 1937 à Gonesse (mort en 2006) ; Robert naît également à Gonesse, le 1er mai 1938 (mort en 1996).

Et enfin Allia, née pendant la guerre.

A cette époque, les Sebbah vivent dans un petit pavillon, au 35, rue Laroque au Blanc-Mesnil (aujourd’hui en Seine-Saint-Denis).

Nous ne savons pas si Isaac, le père d’Allia s’est fait recenser comme juif en octobre 1940, comme l’exigeaient les mesures antijuives du gouvernement collaborationniste. S’il l’a fait, il a dû également inscrire sur sa fiche les prénoms de ses enfants. Or, au regard de la législation antisémite de Vichy, les enfants Sebbah, qui sont par ailleurs de nationalité marocaine comme leur père, sont considérés comme demi-juifs, leur mère n’étant pas juive.

Isaac Sebbah est arrêté en 1943 ; il est déporté le 20 novembre 1943 par le convoi 62. Le site du Mémorial de la Shoah indique le 25 novembre 1943 comme date de sa mort à Auschwitz (SHD, AC 21 P 537 710). De ce convoi de 1200 personnes, seules en arriveront 1181 : 19 évasions de jeunes gens ont eu lieu en cours de route. Ils avaient participé au percement du tunnel dans le camp de Drancy et avaient été dénoncés.

Après l’arrestation d’Isaac, Jeanne se retrouve donc seule et sans ressources avec ses enfants. Elle est contrainte de les placer dans différents centres et orphelinats de Paris et de la région parisienne. L’assistante sociale du Blanc-Mesnil place Mayer, Robert et Allia à l’UGIF, qui prend en charge les enfants juifs dont les parents ont été déportés et aussi ceux que des familles leur confient.

L’UGIF est une structure créée par les autorités nazies et de Vichy en novembre 1941 afin de supplanter d’autres associations juives et de procurer des services sociaux aux Juifs. Elle est dirigée par des Juifs mais sous total contrôle des « Autorités d’occupation ». Si l’UGIF a pu servir parfois de couverture à des actions individuelles de sauvetage d’enfants juifs, malheureusement, au fil des années d’Occupation, ses petits pensionnaires et une grande partie de son personnel ont presque tous été déportés.

La rafle du 21 au 22 juillet

Allia et deux de ses frères, Meyer/Emile et Robert passent d’abord par la maison d’enfants de la rue Secrétan dans le XVIIIe arrondissement de Paris, puis à celle du 30 rue St Hilaire, à Saint-Maur qui dépend de l’UGIF depuis 1943.

Dans un rapport que l’on peut consulter sur internet, il est dit que cet orphelinat a la capacité d’héberger 20 à 25 enfants de 4 à 13 ans. Il s’agit de l’Orphelinat Beiss Yessoïmim, un établissement communautaire. Les ressources viennent de cotisations, dons, vente de charité et un bal. Mais en 1941, seules quelques cotisations subsistent. Les dépenses sont difficilement réglées. L’UGIF prend le contrôle de l’établissement.

Le 20 juillet 1944, Aloïs Brunner, le commandant nazi du camp de Drancy depuis fin juin-début juillet 1943, annonce qu’en guise de représailles de l’attentat contre Hitler du 20 juillet, il va faire arrêter tous les jeunes des foyers de l’UGIF, mais il est fort probable que devant l’avancée des troupes américaines vers Paris, il ait décidé de rafler un maximum de juifs.

Si certains enfants dont les frères d’Allia parviennent à s’échapper à pied, grâce à des voisins résistants[1], Allia est raflée dans la nuit du 21 au 22 juillet 1944. En effet, malade, atteinte d’une gale infectée, elle n’avait pas pu suivre ses frères.

Cette rafle a provoqué un grand effroi comme cela est raconté dans l’ouvrage Les Orphelins de la Varenne, 1941-1944 du Groupe saint-Maurien Contre l’Oubli, réédité en 2023.

L’orphelinat est cerné, les SS veulent l’évacuer, les enfants sont pris de panique et refusent de descendre ; les SS tirent sur la façade ; 28 enfants sont emmenés dans un autobus. 5 membres du personnel sont également arrêtés.

Allia arrive au camp d’internement de Drancy le 23 juillet 1944 et y reçoit le numéro matricule 25595. Elle « loge » à l’escalier 8, étage 3 puis fait un passage à l’infirmerie du camp avant de se trouver à l’escalier 6, étage 3.

Gazée à 4 ans

Allia est déportée le 31 juillet 1944 par le convoi 77, dans lequel 1306 personnes sont déportées en Pologne parce qu’elles sont juives. Parmi elles, presque tous les enfants des centres UGIF de la région Nord que le directeur du camp de Drancy, le nazi Alois Brunner, a fait rafler entre le 21 et le 24 juillet.

Après quelques jours au camp de Drancy, les enfants et les autres détenus sont conduits à la gare de Bobigny. Le voyage se fait dans des wagons à bestiaux, dans des conditions épouvantables et dure 2 jours et presque trois nuits. Tous les jeunes enfants, dont 18 nourrissons, de ce dernier grand convoi parti de Drancy ont été envoyés à la mort dans les chambres à gaz le jour de leur arrivée. Allia en faisait partie.

Sa date officielle de décès est le 5 août 1944.

Déportée politique

Après la fin de la guerre, Jeanne, sa mère fait les démarches pour faire reconnaître la déportation de sa fillette. En 1955, Allia est déclaré Déporté politique. Sa mère touche une « pécule » de 1200 francs pour le préjudice causé (soit l’équivalent de 31 euros).

En 1962, un jugement de décès est rendu au Tribunal de Grande Instance de Pontoise, transcrit le 31 mars de la même année à la mairie du Blanc-Mesnil, considéré comme la ville du dernier domicile d’Allia avant sa déportation.

Sur une fiche analytique, qui retrace le parcours de son dossier depuis qu’il a été déposé, il est précisé que sa mère est française et qu’elle, Allia, est de nationalité marocaine – comme l’était son père.

L’inscription « mort en déportation » figure au Journal officiel du 14 septembre 1991.

Jeanne Feltin Sabbah, qui en 1961 n’avait pour seules ressources que sa très petite pension de veuve, est morte le 30 mai 1977, au Blanc-Mesnil.

Hormis Allia, tous ses enfants ont survécu à la guerre, quatre vivaient avec elle en 1961. A part les trois petits confiés à l’UGIF, pendant l’Occupation les enfants Sebbah se trouvaient à Brunoy, indique leur mère le 27 novembre 1961 à l’agent de police qui enquête sur ce qui est arrivé à Allia.

Un frère d’Allia, Robert a témoigné dans les années 1990 sur la rafle des enfants juifs de La Varenne en 1944.

Les prénom et nom d’Allia figurent sur le monument aux morts de Gonesse avec six autres personnes de la commune mortes en déportation. 

Source : Mémorial de la Shoah, dalle n° 36, colonne n°12, rangée n° 3

Source : Liste reconstituée du convoi de déportation

http://www.findagrave.com.

Grâce aux efforts incessants de Mme Nelly Wolf, ancienne secrétaire de l’Orphelinat Beiss Yessoïmim, une plaque a été apposée en mémoire des enfants de la maison d’enfants UGIF et du personnel encadrant, à La Varenne en 1991.

Sources :

UGIF – Orphelinat de la Varenne – archives

Archives de Paris 75012 AD075TD V11E 0324 0096 JPG

  • Alliah S FRAC93007_1W1591_1926_00116
  • Alliah S FRAC93007_1W1592_1931_00254
  • Alliah S FRAC93007_1W1593_1936_P429
  • Alliah S FRAC93007_1W1595_1954_P286
  • Documents envoyés par Convoi 77 : dossiers personnels d’Allia : DAVCC du SHD de Caen, AC 21 P 271867 et AC 21 P 537709, ainsi que des documents intitulés TD en provenance de International Tracing Services (ITS), les archives allemandes déposées à Bad Arolsen.

AUB 1E264 – Actes de mariages, 1922

Actes de mariage de l’année 1922 à Aubervilliers. : https://archives.seinesaintdenis.fr/ark:/79690/vta9acf2ef500a5770f/daogrp/0/1/idsearch:RECH_9420cbf7540c49abf68788cb8e43fb65?id=https%3A%2F%2Farchives.seinesaintdenis.fr%2Fark%3A%2F79690%2Fvta9acf2ef500a5770f%2Fcanvas%2F0%2F300&vx=1718&vy=-1297.31&vr=0&vz=2.52042

1E001/135 – Actes de naissances, 1901. (image 103)

https://archives.seinesaintdenis.fr/ark:/79690/vta7e8177457925b980/daogrp/0/1?id=https%3A%2F%2Farchives.seinesaintdenis.fr%2Fark%3A%2F79690%2Fvta7e8177457925b980%2Fcanvas%2F0%2F103&vx=2574.07&vy=-1743.25&vr=0&vz=4.38695

Recensement Blanc Mesnil 1926

https://archives.seinesaintdenis.fr/ark:/79690/vtaa8f1fa7c95f945f8/daogrp/0/1/idsearch:RECH_8bfdd43099cec5e59319a4f5d4b8d12d?id=https%3A%2F%2Farchives.seinesaintdenis.fr%2Fark%3A%2F79690%2Fvtaa8f1fa7c95f945f8%2Fcanvas%2F0%2F116&vx=1673.61&vy=-1384.81&vr=0&vz=4.3404

93/86/18 – 1926. : recensement du Blanc-Mesnil

https://archives.seinesaintdenis.fr/ark:/79690/vta0744267b151c8261/daogrp/0/1/idsearch:RECH_8bfdd43099cec5e59319a4f5d4b8d12d?id=https%3A%2F%2Farchives.seinesaintdenis.fr%2Fark%3A%2F79690%2Fvta0744267b151c8261%2Fcanvas%2F0%2F254&vx=905.377&vy=-804.076&vr=0&vz=7.3404

93/86/19 – 1931.

https://archives.seinesaintdenis.fr/ark:/79690/vta03e30fc24da48d11/daogrp/0/1/idsearch:RECH_9606dbd85e2bd78265408d913b85c975?id=https%3A%2F%2Farchives.seinesaintdenis.fr%2Fark%3A%2F79690%2Fvta03e30fc24da48d11%2Fcanvas%2F0%2F95&vx=1164.17&vy=-1057.02&vr=0&vz=3.98932

1872W/12 – Tables de 1945.

https://archives.seinesaintdenis.fr/ark:/79690/vtadbb149e7dd6aeda4/daogrp/0/1/idsearch:RECH_9606dbd85e2bd78265408d913b85c975?id=https%3A%2F%2Farchives.seinesaintdenis.fr%2Fark%3A%2F79690%2Fvtadbb149e7dd6aeda4%2Fcanvas%2F0%2F181

1872W/10 – Tables de 1942 à 1943.

https://www.servicehistorique.sga.defense.gouv.fr/resultats-recherche?cles=Sebbah&thematiques=&lieu=&debut_notices=&debut=&fin_notices=&fin=&cote=&page=1

https://archives.seinesaintdenis.fr/ark:/79690/vta9fea343ee262cd9d/daogrp/0/1/idsearch:RECH_0ed03da5b10cb14d900f666f76f2ac91?id=https%3A%2F%2Farchives.seinesaintdenis.fr%2Fark%3A%2F79690%2Fvta9fea343ee262cd9d%2Fcanvas%2F0%2F15 : acte de décès d’Albert, frère d’Allia page 15 sur 4

AC 21 P 271867 et AC 21 P 537709

Groupe saint-maurien contre l’oubli. Les Orphelins de La Varenne 1941-1944, Le Vieux Saint-Maur Éditeur, 1995

« Les oubliés de Pitchipoï » in Le Mensuel, magazine du Blanc-Mesnil, n°29, juillet-août 1993, pages 14 à 16

[1] Cette information vient de l’interview réalisée par Le Mensuel, magazine municipal du Blanc-Mesnil de Robert Sebbah en 1993, information reprise dans l’ouvrage du Groupe saint-maurien contre l’oubli. Les orphelins de La Varenne 1941-1944, Le Vieux Saint-Maur Éditeur, 1995.

Contributeur(s)

Biographie réalisée par les élèves de Troisième du Collège Guillaume Apollinaire (Paris), sous la direction de leur enseignante, Mme Séné.

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