Julie AMOUYAL
ENQUÊTE
Nous avons commencé par regarder tous les documents fournis par l’association convoi 77, les trier selon leur importance et les informations qu’ils nous apportaient, puis nous avons rapporté ces informations sur des petites fiches. Parfois certains documents étaient difficiles à lire et il y avait quelques incohérences : on retrouvait la déportée qui nous a été attribuée sous différents noms (Julie ou Julia), on avait plusieurs dates différentes pour la déportation et le rapatriement et également plusieurs adresses d’habitation. Par la suite nous avons rédigé la biographie en reprenant les informations les plus fiables et en faisant des recherches pour compléter celles-ci. Nous avons recherché si elle avait des enfants, si elle avait des frères et sœurs, si on avait encore des traces d’elle, à quelle date elle était morte, mais nous n’avons pas trouvé de réponses sûres et exactes à la plupart de ces questions.
ENFANCE
Julie Amouyal, de son nom de jeune fille Julie Ankaoua, est née le 8 mai 1911 à Oran en Algérie. Elle vit auprès de ses parents Salomon Ankaoua, un commerçant, et Clara El Kabbach, et de ses 3 sœurs Perle, Camille et Marie. Julie devient employée à la préfecture d’Oran et vit dans un HLM rue Gambetta. Elle se marie avec Judas Amouyal [1] le 12 août 1933 à Oran.
Le décret de Crémieux adopté durant la guerre de Prusse en 1870 attribue d’office la citoyenneté française aux Juifs d’Algérie. Julie et son mari sont donc citoyens français. Ils quittent Oran pour déménager à Paris. Ils vivent au 4 rue Simon le Franc (Paris 4e arr.), puis au 17 rue de Bretagne (Paris 3e arr.) et enfin au 17 rue Montmartre (Paris 1er arr.).
DÉPORTATION
A partir de 1940, dans le contexte de l’occupation allemande et de l’instauration du régime de Vichy, la France connaît une montée de l’antisémitisme. La nationalité française est retirée aux Juifs et ils sont interdits d’exercer divers métiers. Julia et son mari intègrent la Résistance française et empruntent le nom Sabatier comme nom de résistants.
C’est dans ce contexte que Julia est arrêtée le 14 juillet 1944 par les forces de l’ordre françaises. Elle est alors envoyée au camp de Drancy. Cette cité construite en 1930 est située au nord-est de Paris. Elle sert de camp de transition pour les Juifs français. Julie et son mari, comme tous les autres Juifs détenus, subissent des conditions de détention déplorables. Ils ne disposent que du sol pour dormir, et de minuscules quantités de pain et de soupe pour s’alimenter [2]. Le 31 juillet 1944, Julie Amouyal est déportée vers le plus grand centre de mise à mort, Auschwitz-Birkenau. Elle fait partie du convoi 77, qui quitte la gare de Bobigny en direction de la Pologne. Il s’agit du dernier convoi envoyé à Auschwitz depuis Drancy. A son arrivée, elle se fait tatouer le numéro de déporté 16.66IA au bras gauche.
Julia est contrainte au travail forcé. Les conditions de vie sont encore plus rudes qu’à Drancy. Elle est séparée de son mari, dans une zone du camp exclusivement réservée aux prisonnières. Les femmes détenues à Auschwitz sont soumises à des conditions inhumaines. Elles subissent la surpopulation, la malnutrition, le travail forcé, la maladie, la violence et l’humiliation. Beaucoup sont soumises à des expériences médicales inhumaines et à des avortements forcés. Certaines femmes sont également victimes de violences sexuelles de la part des gardes et des officiers nazis [3]. Dans le contexte de l’avancée des soviétiques vers le camp d’Auschwitz pour le libérer, Julia est envoyée au camp de Kratzau en février 1945, un camp de travail et de concentration en Tchécoslovaquie où les femmes et les hommes sont mélangés. Elle est finalement libérée le 8 mai 1945 par les résistants russes et rapatriée à Paris le 3 juin 1945. Elle fait partie des 251 survivants du convoi 77.
APRÈS LA DÉPORTATION
À son retour à Paris, Julia tente de reprendre sa vie en main, aidée par les mesures mises en place par le gouvernement français. Des programmes d’accueil et de prise en charge des survivants de la déportation ont été instaurés en France. Le gouvernement français propose des programmes d’indemnisation pour les victimes de la Shoah : ils peuvent obtenir le titre de “déportés politiques” pour bénéficier d’une pension. Il est aussi possible d’obtenir réparation pour la perte de membres de la famille due à l’extermination des Juifs organisée par le régime nazi [4]. Julia tente alors d’obtenir justice après son retour de déportation, en formulant plusieurs demandes.
Julia réclame une indemnisation de l’Etat en tant que déportée. Elle obtient finalement un dédommagement de 13 200 francs.
N’ayant aucune nouvelle de son mari depuis la déportation, elle envoie diverses lettres aux instances gouvernementales pour réclamer des recherches. Finalement, celui-ci est déclaré comme disparu.
Elle formule aussi une demande du titre de “déportés résistants” à la place de “déportés politiques » pour elle et son mari. Cela leur permettrait d’acquérir une position de combattants volontaires résistants au lieu d’être considérés comme des victimes civiles. Cette demande a finalement été rejetée.
Elle réussit cependant à obtenir un bulletin de décès pour son mari, comprenant la mention “mort pour la France”, le 7 mars 1950.
Elle a ensuite repris le cours d’une vie civile normale, et elle est, selon nos hypothèses, morte le 20 avril 1991 à l’âge de 79 ans [5]. Son nom figure maintenant sur le mur des noms du mémorial de la Shoah à Paris, dalle n° 2, colonne n° 1, rangée n° 2.
Notes & références
[1] Vous pouvez retrouver la biographie de Judas Amouyal sur le site Convoi 77
[2] Drancy. (s. d.). https://encyclopedia.ushmm.org/content/fr/article/drancy France. (2018, 21 juin). Si je reviens un jour : les lettres retrouvées de Louise Pikovsky. FRANCE 24. https://webdoc.france24.com/si-je-reviens-un-jour-louise-pikovsky/chapitre-4/index.html
[3] Mémorial de la Shoah. (s. d.). https://ressources.memorialdelashoah.org/notice.php?q=identifiant_origine%3A%28FRMEMSH040870780212%29
[4] | Fondation Shoah. (s. d.). https://www.fondationshoah.org/
[5] Geneanet : Your family history. (s. d.). Geneanet. https://www.geneanet.org/
BIBLIOGRAPHIE
Auschwitz. (s. d.). https://encyclopedia.ushmm.org/content/fr/article/auschwitz
Contributeurs aux projets Wikimedia. (2024, 14 avril). Histoire des Juifs en Algérie. https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_des_Juifs_en_Alg%C3%A9rie#Seconde_Guerre_mondiale
Drancy. (s. d.). https://encyclopedia.ushmm.org/content/fr/article/drancy
Fondation Shoah. (s. d.). https://www.fondationshoah.org/
France. (2018, 21 juin). Si je reviens un jour : les lettres retrouvées de Louise Pikovsky. FRANCE 24. https://webdoc.france24.com/si-je-reviens-un-jour-louise-pikovsky/chapitre-4/index.html
Geneanet : Your family history. (s. d.). Geneanet. https://www.geneanet.org/
Juifs et musulmans de la France coloniale à nos jours. (s. d.). Musée de L’histoire de L’immigration. https://www.histoire-immigration.fr/juifs-et-musulmans-de-la-france-coloniale-a-nos-jours
Les Juifs, des Algériens (pas) comme les autres. (s. d.). lhistoire.fr. https://www.lhistoire.fr/les-juifs-des-alg%C3%A9riens-pas-comme-les-autres
Mémorial de la Shoah. (s. d.). https://ressources.memorialdelashoah.org/notice.php?q=identifiant_origine%3A%28FRMEMSH040870780212%29
Memorial and Museum Auschwitz-Birkenau. (s. d.). Auschwitz-Birkenau. https://www.auschwitz.org/en/