Dobrisch DRUCKER

Dobrich Rose Drucker, née Goldfeld, le 6 décembre 1906 à Chargorod en Russie, est fille de Baila Doubjack et Haïm Goldfeld, tous les deux de nationalité Russe[1]. On ignore à quelle date la famille Goldfeld s’installe en France mais Dobrisch obtient la nationalité française en épousant Jacques Drucker le 27 octobre 1932 à Paris. Ce dernier est en effet né à Paris dans le 18^e arrondissement, le 26 novembre 1901, et a obtenu la citoyenneté française par déclaration souscrite, le 11 juin 1915, devant le juge de Paix du 17^e arrondissement[2]. Le couple s’installe ensuite au 47 rue Boinod dans le 18^e. C’est à cette adresse que naissent leurs deux enfants, Maurice Raoul, le 23 juin 1933, et Raymond, le 21 janvier 1936. A cette époque, Dobrisch exerce le métier de sténodactylographe[3].

La famille semble avoir ensuite déménagé au 37 de la rue Boinod. C’est en tout cas l’adresse indiquée sur le registre de la Préfecture de police de Paris à l’occasion de l’arrestation de Dobrisch, le 23 juillet 1944. Le registre précise également le motif de l’arrestation (« juive ») et les autorités responsables (« affaires juives »)[4]. Dobrisch affirme avoir été arrêtée par des agents allemands de la Gestapo, peu après que ceux-ci aient appréhendé son mari, rue Ordener[5]. Cette version de l’arrestation est attestée par deux témoins, Jean Guillaumeau et Gaston Baubion[6]. Dobrisch a été déplacée vers le camp de Drancy dès le lendemain puis déportée vers Auschwitz le 31 Juillet 1944[7]. Elle est arrivée là-bas le 3 août 1944[8].

Dobrisch Drucker a ensuite été transférée du camp d’Auschwitz vers le camp de travail de Kratzau (actuelle République Tchèque) puisque c’est là qu’elle est libérée par les armées russes le 8 mai 1945. Elle est rapatriée au centre de Saint-Avold à la frontière franco-allemande, le 28 mai 1945 soit 20 jours après la victoire des Alliées face à l’Allemagne nazie[9]. La fiche de son examen médical, réalisé à l’occasion de son rapatriement, témoigne de la dégradation importante de son état de santé avec une perte de poids d’environ 10 kilos[10].

A son retour en France, Dobrisch s’installe au 37 rue Boinod avec ses deux enfants et entame diverses démarches auprès des pouvoirs publics pour obtenir des nouvelles de son mari, décédé au Struthof le 25 novembre 1944[11], et pour obtenir le statut de « déporté politique ». Elle dépose une demande en ce sens le 15 décembre 1952. Elle se dit alors auxiliaire sociale[12]. Elle obtient une réponse positive de l’administration française le 20 décembre 1954[13]. En conséquence, elle reçoit en mai 1955, un chèque du Trésor Public de 12 000 francs[14]. Elle obtient également le titre de pupille de la nation pour ses deux enfants[15].

Fiche d’examen médical de Dobrisch Drucker (DR1D751 et DR17991)

Biographie réalisée au cours de l’année scolaire 2023-2024, par les élèves de 3ème E du collège Christine de Pisan (Aulnay-Sous-Bois), dans le cadre du projet européen « Convoi 77 ».

A l’exception du registre des arrestations de la préfecture de Police de Paris (DRUCKER-Dobrisch-APP_CC2-9), les élèves ont travaillé sur un unique dossier d’archives, issu du Service Historique de la Défense de Caen qui semble avoir été constitué à partir des documents rassemblés par Dobrisch Drucker après son retour de déportation pour obtenir la reconnaissance de son statut de « déporté politique » par les autorités françaises. La principale limite de ce corpus est la très courte période qu’il permet d’appréhender : essentiellement l’arrestation et la déportation. Les documents révèlent parfois des contradictions entre les informations transmises par Dobrisch et celles enregistrées par l’administration française. Ces dernières s’avèrent par ailleurs très lacunaires. Ce travail a cependant permis de mettre en avant un parcours de déportation singulier et de rendre visible les étapes du retour et notamment la longueur et la complexité des procédures administratives aillant permis aux rescapés de faire reconnaître leur statut et de faire valoir leurs droits.

Sources

[1] Compte rendu des Renseignements Généraux pour le Ministère des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre (DR1F0C1) ; fiche d’examen médical – recto (DR17991).

[2] Certificat de nationalité (DR15031).

[3] Actes de naissance de Maurice (DR36EC1) et Raymond (DRC8751) Drucker.

[4] Registre de la Préfecture de police de Paris (DRUCKER-Dobrisch-APP_CC2-9).

[5] Compte rendu des Renseignements Généraux pour le Ministère des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre (DR1F0C1).

[6] Attestations d’arrestation (DR3BA81).

[7] Demande de renseignements administratifs (DR9D201) ; certificat de déportation (DR41A21) ; Demande d’attribution du titre de déporté politique – page 3 (DRUCKE4).

[8] Fiche d’examen médical – recto (DR17991).

[9] Certificat de déportation (DR41A21) ; demande de renseignements administratifs (DR9D201).

[10] Fiche d’examen médical – verso (DR1D751)

[11] Voir la biographie de Jacques Drucker.

[12] Demande d’attribution du titre de déporté politique – pages 1 et 5 (DRUCKE2 ; DRED0E1)

[13] Demande d’attribution du titre de déporté politique – page 6 (DR46011) ; attribution du titre de déporté politique (DR5FA11).

[14] Fiche de contrôle en vue du paiement du pécule aux déportés politiques (DRC4A61).

[15] Actes de naissance de Maurice (DR36EC1) et Raymond (DRC8751) Drucker.