Claude BROÏDO

1940-1944 | Naissance: | Résidence: ,

Claude BROÏDO

Photo : Claude et son père Isaac © Mémorial de la Shoah/Coll. Delphine Ouazan Labrosse 

Claude Broïdo (ou Broydo) a été déporté avec son père et sa mère dans le convoi 77, dernier grand convoi parti de France à destination du camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau en Pologne. Il fait partie des six millions de victimes de la Shoah.

Claude est né à Paris le 5 mai 1940 dans le VIIe arrondissement[1]. Il est le second fils des époux Broïdo, Isaac Albert et Brana Blanche (née Weintraub à Alexandrie), mariés depuis 1924[2]. Son père est commerçant et sa mère sténodactylo. Claude a un frère de douze ans, Marc, né le 13 janvier 1928[3]. La famille est d’origine juive.

Pendant les deux premières années de sa vie, Claude vit avec sa famille à Paris au 33 boulevard Saint-Martin, dans le IIIe arrondissement[4]. Ses parents possèdent également une résidence secondaire à Cannes, la villa Cacho Maïo, avenue Commandant Bret, qui devient sa nouvelle maison à partir de 1942. Les Broïdo, en effet, comme de nombreux Juifs après les rafles de l’été 42, dont celles du Vel d’Hiv’, se sont réfugiés en zone sud. Cannes est alors administrée par les autorités italiennes, nettement moins enclines à faire appliquer les mesures antijuives prises par les Autorités d’Occupations allemandes et le gouvernement collaborationniste de Pétain. Albert, le père de Claude, mettra également en avant ses activités résistantes comme raison pour s’être installé dans le Sud[5]. On imagine que Claude a pu profiter d’après-midis avec ses parents et son frère sur les plages cannoises. Sur une photographie conservée au Mémorial de la Shoah, Claude se montre curieux face à la mer avec son père, Albert.

Le père de Claude continue ses activités de résistance avec le réseau Mithridate[6], dans les Alpes-Maritimes, ce qui amène la Gestapo sur les traces de la famille Broïdo. Mais, à partir du 11 novembre 1942, la Wermacht envahit la zone libre. Les Italiens décident de s’emparer des huit départements qui bordent l’Italie, les Juifs peuvent y résider légalement. Mais la capitulation du maréchal Badoglio le 8 septembre 1943, entraine la fin de la présence italienne en France en octobre 1943. Aloïs Brunner qui est déjà commandant (et tortionnaire) du camp de transit de Drancy en région parisienne, est envoyé par le responsable SS de la déportation des Juifs, Heinz Röthke, pour venir faire une chasse aux Juifs sur la Riviera. Du 10 septembre au 15 décembre 1943, avec douze à quatorze sbires, dont le sinistre Brückler, ils organisent une véritable « chasse à l’homme [7]», à coup de rafles qui visent aussi bien les vieillards, les malades, les femmes et les enfants que les hommes valides. Ils sont brutalisés et torturés par l’équipe de Brunner, qui a même venir un médecin juif du camp de Drancy, le Dr Abraham Drucker, pour ranimer ceux dont il veut obtenir des informations précises. Malgré la violence de son action, Brunner n’arrive pas à obtenir son « compte » de Juifs. La population niçoise est « outrée ». Mais près de 1900 personnes sont envoyées à Drancy pour être déportées. Et, après le retour à Paris de Brunner, des équipes nazies prennent le relais. C’est ainsi que la famille Broïdo va être doublement exposée, comme juive d’une part, et pour des activités de résistance d’autre part.

ARRESTATION ET DÉPORTATION

Un mois après ses 4 ans, le 27 juin 1944, Claude est arrêté avec ses parents par la Gestapo à la Villa Cacho Maïo – son grand frère, Marc, âgé de 16 ans, parvient à échapper à l’arrestation en se cachant sur le toit de la maison, et il sera ensuite caché avec ses grands-parents Broïdo[8]. Selon Martine Broïdo, la fille qu’Albert aura après-guerre, Claude n’est pas à la villa. « Claude jouait chez le voisin et voyant ses parents arrêtés leur a demandé « “Où allez-vous ? je veux aller avec vous !” La voiture qui démarrait s’est arrêtée. Les deux Allemands disaient “On ne prend pas l’enfant !” Et les deux Français “Si ! Il faut le prendre !” Il a donc été emmené », écrit-elle dans son témoignage[9].

La famille Broïdo est aussitôt internée à l’Hôtel Excelsior à Nice, le quartier général du commando anti-juif, où le père de Claude est interrogé pendant plusieurs jours. La Gestapo confisque les biens emportés par la famille là-bas[10]. Sur les papiers officiels, Claude et sa famille sont reconnus avoir été arrêtés pour des raisons raciales – seul leur statut d’israélite étant mentionné[11].

Claude est transféré à Drancy avec sa famille. Il y arrive le 12 juillet 1944. Son prénom n’apparaît pas dans la fiche de camp de sa mère Brana, mais les autorités font référence à Claude sous la dénomination « + fam ». Il obtient donc le numéro de matricule de sa mère, le 25075, ainsi que le statut de « déportable immédiatement », caractérisé par la lettre B, qui est inscrite sur sa fiche [12]. Claude passe plus de dix jours dans le camp de Drancy au niveau de l’escalier 3, chambre 1 avec sa famille[13].

Finalement, Claude est déporté, terrorisé et ne voulant pas quitter son père, le 31 juillet 1944 avec ses parents dans le convoi 77. Après un voyage terrible, où les 1306 déportés de ce convoi étaient entassés à 60 dans des wagons à bestiaux, sur de la paille, sans hygiène, sans eau et sans air frais, le train est arrivé en Pologne, à Auschwitz, au camp d’Auschwitz-Birkenau.

Dans la nuit du 3[14] août 1944, l’enfant est dirigé avec sa mère, Brana, vers les camions qui les emmènent vers les chambres à gaz. Il est assassiné, le jour de son arrivée[15], avec sa mère. Il n’avait que quatre ans.

Son père est sélectionné pour le travail et entre dans le camp. Albert survit et retrouve le frère de Claude, Marc, en 1945. À partir de 1947, son père entreprend des démarches pour faire reconnaître le statut de « mort pour la France » et de déporté politique (c’est-à-dire « juif ») pour Claude. Il obtient le premier statut en 1947[16] et le second en 1953[17]. Albert tente également d’obtenir le « Diplôme d’Honneur » pour Claude et sa mère. Cela lui est refusé en novembre 1957, les déportés n’étant pas (alors) reconnus comme famille de militaire ou de résistant.

En 1990, soit quarante-six ans après sa mort, sa tante paternelle, Suzanne Képès lui rend un dernier hommage en témoignant pour lui à Jérusalem auprès du mémorial du Yad Vashem[18].

De la vie de Claude, il ne reste qu’une photographie et un dossier d’archives qui contient les documents fournis par son papa pour faire reconnaître son statut de déporté politique. La vie de Claude commençait tout juste quand les nazis la lui ont enlevée pendant la Shoah.

Notes & références

[1] BROÏDO, Claude © SHD de Caen DAVCC, Dossier n° 21P43107876973

[2] BROÏDO, Brana Blanche © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P431077(24)

[3] BROÏDO, Brana Blanche © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P431077(49)

[4] BROÏDO, Brana Blanche © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P431077(33)

[5] BROÏDO, Brana © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P431077(44) / BROÏDO, Albert © SHD Vincennes GR 16 P 92380

[6] Le réseau Mithridate a été fondé en juin 1940 par Pierre Herbinger à la requête du service britannique de renseignement MI6. Laure Diebold, secrétaire de Jean Moulin, en faisait partie.

[7] Mary FELSTINER, « Commandant de Drancy: Alois Bruner et les Juifs de France », Le Monde juif 1987/4, p. 143 à 172. https://shs.cairn.info/revue-le-monde-juif-1987-4-page-143?lang=fr#re1no24

[8] BROÏDO, Brana Blanche © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P431077(44-45)

[9] Voir plus loin, son témoignage in-extenso.

[10] BROÏDO, Isaac Albert © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P71845476971. Les biens volés aux Juifs servent à payer l’hôtel, in https://museedelaresistanceenligne.org/media3565-Stle-de-lHtel-Excelsior

[11] BROÏDO, Claude © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P43107876973

[12] BROÏDO, Brana © Mémorial de la Shoah (FRAN107_F_9_5683_114079_L)

[13] BROÏDO, Brana © Mémorial de la Shoah (FRAN107_F_9_5683_114079_L)

[14] Son père se trompe en indiquant 11 août comme date de décès sur le dossier de Claude. Aucun enfant en bas-âge n’est entré dans le camp. Ils ont tous été gazés avec leur mère à l’arrivée.

[15] BROÏDO, Claude © SHD de Caen DAVCC, Dossier n°21P43107876973

[16] BROÏDO, Claude © SHD de Caen DAVCC, Dossier n° 21P43107876973

[17] BROÏDO, Claude © SHD de Caen DAVCC, Dossier n° 21P43107876973

[18] BROÏDO, Claude © Yad Vashem

Contributeur(s)

Biographie réalisée par les élèves de troisième du collège Paul Eluard à Bonneuil-sur-Marne, encadrés par leur professeur Mme Borie Giovanna.

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