Adolphe FEINSTEIN

1905-1944 | Naissance: | Arrestation: | Résidence:

Adolphe FEINSTEIN

Ci-Contre : Adolphe Feinstein avec son neveu et sa nièce, Marcel et Suzanne Coifman (1939-1940). Fonds personnel Annie Esterzon.

Qui est-il ?

Une partie de la classe de 3ème2 du collège Jean de la Fontaine du Mée-sur-Seine a travaillé sur la biographie d’Adolphe Feinstein, 39 ans, mort en déportation.

Dans le cadre de cette recherche, les élèves ont visité le Mémorial de la Shoah à Paris où ils ont pu assister au témoignage de Anna Koch, enfant cachée. Ils ont ensuite visité le lieu de mémoire de Drancy.

Grâce à la nièce d’Adolphe, Annie Esterzon, nous avons pu avoir une photographie d’Adolphe. Nous avons eu un dialogue régulier avec Mme Esterzon, qui nous a fourni des documents pour constituer l’arbre généalogique. Nous la remercions chaleureusement pour sa gentillesse et sa disponibilité.

Les élèves ont imaginé une représentation symbolique d’Adolphe: il s’agit d’un boxeur qui combat ce qui renvoie au nazisme. En effet, Adolphe était résistant.

Deux élèves ont imaginé le monologue d’Adolphe quand il était à Drancy.

I. Avant la guerre

1) Sa famille

Arbre généalogique réalisé par deux élèves de 3ème2

Adolphe Feinstein a des cheveux noirs, des yeux marron, un front ordinaire, un nez petit ainsi qu’un visage ovale. Il mesure 1m66.

a) Ses frères et sœurs

Adolphe est le fils de Abraham Feinstein et de Sarah Eidelman. Il n’est pas fils unique: il a 8 autres frères et sœurs dont l’aînée est Clara, née le 10 Novembre 1897, puis Marcelle, le 10 Février 1900, Anna, le 5 Aout 1901, Joseph le 19 Septembre1903, ensuite Adolphe lui-même le 5 Septembre 1905, Samuel, le 19 Septembre 1909, Paul, le 3 Septembre 1912, Michel le 30 Janvier 1915 et enfin Gabrielle, le 12 avril 1917.

b) Ses parents

Abraham Feinstein est né le 16 avril à Galatz en Russie. Les grands-parents d’Adolphe du côté paternel sont Wolf Feinstein et Naissa Levy.

Sarah Eidelman, la mère d’Adolphe, est née le 10 août 1874 à Akermann en Russie. Elle est la fille de Joseph Eidelman et de Gabrielle Abramovitch.

Le père d’Adolphe a servi dans l’infanterie à Balta près d’Odessa en 1913 et lors de la guerre, il s’est présenté par deux fois aux Invalides pour s’engager, la dernière fois le 27 août, mais il a été refusé à la visite médicale du 14 septembre 1914. Abraham a un frère qui s’appelle Simon qui habite à Paris, rue du figuier, ainsi qu’une sœur, qui se nomme Adèle, qui est à Chicago.

Abraham et sa famille habitent en France depuis 1900. Abraham est employé par la maison de commerce Spalter (manufacture de casquettes, bérets, chapeaux) depuis le 13 décembre 1908. Le 9 décembre 1924, la préfecture de police donne son approbation à Abraham pour qu’il ait la nationalité française. Le 26 janvier 1925, Abraham Feinstein obtient sa naturalisation.

Clara et Marcelle ont aussi fait une demande de naturalisation.

On apprend dans le dossier de naturalisation d’Abraham que son fils, Joseph, a commis un vol à l’étalage en 1918 à l’age de 14 ans. Adolphe a aussi commis un vol de cinq articles au bazar de l’hôtel de ville en 1921 à l’âge de 15 ans.

2) Ses lieux d’habitation

La famille Feinstein a souvent déménagé. Elle a habité rue des Jardins Saint-Paul, rue Charles V, où est né Adolphe, rue de la Cerisaie, rue François Miron, rue de la Verrerie, place de la Bastille, rue de la forge Royale du 27 avril 1914 à 1919 et rue Beccaria n°19, dans le 12 ème arrondissement. Ce dernier appartement sera habité par la veuve d’Adolphe jusqu’en 1970. Au recensement de 1946, Cornelia déclarera Adolphe comme étant un habitant du foyer, sans doute parce qu’elle ne sait pas encore ce qui lui est arrivé.

a) Au 19 rue Beccaria

Adolphe Feinstein habitait dans le 12ème arrondissement à Paris, au 19 rue Becaria avec Abraham, Sarah (ses parents) Clara, Marcelle, Anna, Joseph, Samuel, Paul, Michel, Gabrielle (ses frères et sœurs). Marcelle était finisseuse casquette, Anna était chapelière et Samuel était apprenti tapissier, Paul était électricien. Dans cet immeuble, Il y avait aussi la famille Fayt. Ils étaient employé et concierge; le père de famille des Lavoux était serrurier et M. Loyot était menuisier. Les voisins des Feinstein étaient donc d’une catégorie sociale modeste. Beaucoup viennent d’autres régions que l’île de France. Les Feinstein sont les seuls venant de Russie. Il y a quelques familles italiennes et une famille Polonaise, les Jouraff, qui sera déportée par la convoi 47.

b) Au 247 boulevard Voltaire

Adolphe a ensuite déménagé en 1931 dans le quartier Sainte Marguerite au 247 boulevard Voltaire avec Albert et Cornélia, son fils et sa femme. Les voisins des Feinstein sont d’origine beaucoup plus cosmopolite que rue Beccaria : ils viennent d’Espagne, d’Arménie, de Turquie, d’Italie, de Pologne. Ils sont ébéniste, miroitier, monteur de chaussures, serrurier…Lazare Weigler, tailleur et résidant au 247 boulevard Voltaire, en même temps que les Feinstein, sera déporté par le convoi n°9.

3) Son service militaire

En 1925, Adolphe a vingt ans et doit effectuer son service militaire. Dès le début, il est réformé pour des problèmes de santé. D’abord, il est classé « service auxiliaire ». Le service auxiliaire représentait les hommes en moins bonne santé qui ne pouvaient faire un service actif dans l’armée mais qui étaient quand même soumis au service militaire. En effet, on lui diagnostique une otite moyenne chronique à l’oreille droite et une varice à la jambe droite. Il est incorporé au 21ème régiment d’infanterie coloniale. Après avoir manqué aux appels, il rentre volontairement au corps le 4 septembre 1926. Il reçoit une sanction disciplinaire. Il est ensuite renvoyé dans ses foyers avec un certificat de bonne conduite.

Le 22 mai 1926, la mère d’Adolphe, Sarah, meurt.

En 1929, il est mobilisé au centre d’infanterie coloniale n°49 mais sans affectation.

En septembre 1939, quand la guerre éclate, il est rappelé à l’activité. On ne sait pas ce qui s’est passé par la suite.

4) Les mariages d’Adolphe

a) Lucie Bastiens

Adolphe Feinstein s’est marié le 26 mars 1927 dans le 4ème arrondissement de Paris avec Lucie Bastiens. Elle a 17 ans et lui 22. Elle est journalière et habite avec sa grand-mère maternelle, Constance Henriette Lecoq, rue des Immeubles Industriels (ses parents, Henri Alphonse Bastiaens et Julie Vallot sont morts tous les deux). Lucie est née à Ambert, dans le Puy de Dôme. Au mariage assistent deux témoins, Léon Zeligfeld, chapelier et Maurice Vablot, raboteur. Seul son père, Abraham, assiste au mariage. On apprend que Adolphe exerce le métier de metteur en couleur ou de vernisseur comme l’indique sa carte d’électeur.

Le 9 janvier 1929, Adolphe et Lucie divorcent.

b) Cornelia Spanjerberg

Mais Adolphe s’est remarié avec Cornélia Spanjerberg le 26 mars 1932. Elle est belge : elle est née à Anvers le 16 octobre 1904. Son père, Jan Spanjerberg et sa mère, Jacoba Ripet sont absents lors du mariage. Assistent à la cérémonie deux témoins : Berthe Nuytkens et Yvonne Zimmerman, deux cartonnières, comme Cornelia.

Ils ont eu un fils, Albert, né le 17février1929 à Paris. Adolphe le reconnaît comme son fils le 20 août.

Le 11 février 1929, Abraham, le père d’Adolphe, meurt.

II. La guerre

1) La Résistance

Cornélia, la veuve d’Adolphe, n’a pas cessé de faire reconnaître l’activité de résistant de son mari. Elle fait plusieurs dossiers de demande d’attribution du titre de déporté résistant dans les années 1960. S’en suivent plusieurs enquêtes qui nous servent à reconstituer son parcours.

En septembre 1940, Adolphe entre au Parti Communiste. Il est contacté par un résistant du nom de Paysé (dit Séverin, Bertrand, Dudal). À intervalles réduits, Adolphe participe à plusieurs actions de propagande anti-nazies comme des distributions de tracts ou des collages d’affiches. Il fait partie du Front National, qui dépend du parti communiste, depuis le 1er juin 1941. Il est agent de liaison. Il a le grade de sergent et son pseudo est Négus. On lit également qu’il est membre d’un groupe de protection FTPF.

Cependant, René Derrien, instituteur depuis 1941 et secrétaire de mairie à Bois-le-roi, interrogé dans le cadre d’une enquête diligentée par le préfet de l’Eure en 1963, déclare qu’il ne connaît personne du nom d’Adolphe Feinstein ayant résidé dans la commune et qu’il n’a aucune connaissance d’une arrestation par la police allemande à Bois-le-roi. Contactée, la mairie de Bois-le-roi n’a pas pu nous donner d’informations sur Adolphe non plus.

Le 15 mai 1944, il est arrêté par la police allemande à Bois-le-roi dans l’Eure et transféré à la prison de Fresnes. Le 19 juillet 1944, il est transporté à Drancy.

En 1970, Adolphe Feinstein perd son statut de déporté résistant. On peut lire sur son dossier : « Il n’est pas établi que la détention ait été motivée par un acte qualifié de résistance à l’ennemi ».

Selon sa nièce avec laquelle nous avons plusieurs fois été en contact, Adolphe aurait été à Nice pendant la guerre mais nous n’avons pas pu le prouver.

2) L’arrestation et la déportation

Adolphe Feinstein est donc arrêté le 15 Mai 1944 , interné à Fresnes et à Drancy.

Adolphe est aux côtés d’Ernest Mandelbaum, lui-même prisonnier à Fresnes, quand il entre à Drancy. Ils sont escalier 18 au 4ème étage puis Adolphe sera déplacé escalier 2, 2ème étage. Il reste 12 jours à Drancy.

Clara, sa sœur, est à Drancy au même moment avec son mari, Salomon Scher, et ses deux enfants: Gaston (11 ans) et Serge (16 ans). Ils seront déportés dans le même convoi. Adolphe les a-t-il retrouvés ? Étaient-ils ensemble à Drancy ?

Monologue d’Adolphe imaginé par deux élèves :

« Je me suis fait arrêter par la police Allemande à Bois-Le-Roy, interner à Fresnes pour cause de résistance. Vu que je suis juif, moi et d’autres camarades de Fresnes, nous sommes tous envoyés à Drancy. Pourquoi on va là-bas? Qu’est-ce qu’ils vont faire de nous? Il fait chaud, il y a des barbelés tout autour. Un chantier transformé en camp, voilà ce que c’est Drancy. Nous vivons dans des conditions terribles, les lits ne sont pas confortables, les murs sont en béton , les sols sont en béton, nous n’avons pas d’intimité, nous sommes oppressés par un nombre incalculable de personnes. Des enfants en train de pleurer, des adultes en dépression. Où sommes-nous et pourquoi? J’ai souvent changé d’escalier depuis mon arrivée dans cet endroit horrible. Certes, les pièces sont ouvertes mais nous sommes enfermés comme dans une sorte de prison.

En descendant de mon escalier, j’aperçois ma sœur, ses enfants puis son mari, mon regard se vide, des larmes coulent. C’est un rêve éveillé que je suis en train de vivre. J’ai couru les embrasser de toutes mes forces. Moi qui pensais que je n’allais plus les voir, je suis tellement ému de les voir que je n’arrive pas à m’exprimer. »

Le convoi 77 part le 31 juillet 1944 et arrive le 5 août à Auschwitz. Adolphe a 39 ans.

III. Après la guerre

La famille Feinstein a beaucoup souffert de la Shoah: Clara (de son nom de mariée Scher) et sa famille, Anna (Coifman de son nom de mariée) et sa famille et Gabrielle Feinstein sont arrêtées et  déportées. Anna et Gabrielle ont été déportées par le convoi 76. Clara ainsi que sa famille ont été déportées dans le convoi 77.

Gabrielle Feinstein est la seule survivante des camps. Elle pesait 29 kg à son retour. Sa fille, Annie Esterzon, est née un an après le retour de sa mère de déportation. Elle a 77 ans. Elle a eu 3 enfants et 6 petits enfants. Son frère a deux enfants et un petit fils. Elle nous écrit: «C’est la revanche de la vie sur la mort: « Ils ont voulu nous enterrer, ils n’avaient pas compris que nous étions des graines.»

This biography of Adolphe FEINSTEIN has been translated into English.

Contributeur(s)

Classe de 3ème2 du collège Jean de la Fontaine du Mée-sur-Seine, sous la direction de leur professeur Muriel Baudry.

Reproduction du texte et des images

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2 Comments
  1. Scher 6 mois ago

    Merci
    Je suis la petite fille de Clara Feinstein et de Salomon Scher
    Mon père David Scher a échappé à la déportation

  2. Claire Soudry 5 mois ago

    Bonjour , nous sommes les arrières petites filles de Clara Feinstein et de Maurice Valenski. On est en pleine recherche sur l’arbre généalogique.. Si vous le souhaitez nous pourrions rentrer en contact avec plaisir.

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