Régine REIN

1938-1944 | Naissance: | Arrestation: | Résidence:

Régine REIN

Nous (Katie Ennon, Amarine Bernard, Prudence Moreau, Anouck Ranger et Margaux Rocher) sommes cinq lycéennes de l’établissement Victor Hugo de Poitiers (86) qui avons décidé de nous engager dans l’écriture de la biographie de Régine Rein. Nous avons pu prendre part à un projet historique proposé par notre professeur d’humanités, littérature, philosophie, afin de rendre hommage aux disparus de la Shoah. Dans un même temps, nous avons découvert le passé de manière plus locale, en marchant sur les traces d’une enfant ayant séjourné à Poitiers. Il nous tenait à cœur de faire résonner la mémoire des Juifs, tout en participant à un devoir de transmission : en entreprenant une recherche pour que nous n’oubliions pas de maintenir vivante la mémoire de la Shoah.

I/ L’enfance de Régine Rein

Régine Rein, fille de Gitla Einsenbach et de Jacob Rein, est née le 20 mai 1937 à Nancy rue de Strasbourg au numéro 98. Elle avait un frère et une sœur : Henri, né le 25 septembre 1921 à Tarnow en Pologne, et Rosa née le 15 juillet 1925 dans la même ville qu’Henri. Son père est tailleur d’habits, il est né le 7 février 1889 à Obertyn en Ukraine et sa mère est sans profession, elle est née le 10 août 1897 à Tarnow en Pologne. Les parents étaient domiciliés à Nancy (voir document ci-dessous), 15 rue Saint Thiébault en 1936, puis en 1939 ils habitent aux n°70 rue de la Hache, au 2ème étage. A cette époque le département de Meurthe-et-Moselle doit faire face à l’occupation allemande et les Juifs font rapidement face aux traitements qu’ont dû subir les autres Juifs des pays de l’Axe.

II/ Les arrestations et déportations de sa famille

Au vu de l’occupation allemande dans le Nord, la famille a fui dans la Vienne, et a certainement vécu à Sanxay pendant un certain temps, où elle fut arrêtée entre 1941 et 1942. Sa mère Gitla est déportée par le convoi n°8 au départ d’Angers le 20 juillet 1942 pour Auschwitz. Pour leur part, son père Jacob, son frère Henri et sa sœur Rosa sont déportés par le convoi n°26 le 31 août 1942 du camp de Drancy à destination d’Auschwitz également.

Régine est arrêtée, elle, à Loudun le 17 mai 1943 et rejoint le camp de Poitiers. (Voir document ci-dessous)

III/ Le camp de Poitiers

Le 4 décembre 1940, dans le camp de concentration où il n’y avait que des réfugiés espagnols (républicains) dans des baraquements (le long de la route de Limoges à Poitiers), il est décidé que les Tsiganes, les Nomades et enfin les Juifs seront placés au même endroit. Le camp de la route de Limoges sera dirigé par différents directeurs et régulièrement surveillé par un inspecteur général. C’est à eux que revenaient la responsabilité des transferts des Juifs vers Drancy et les déportations pour le travail. En juillet 1942, la Police Nationale sur ordre de l’autorité allemande décide de faire un recensement, le préfet donnera une réclamation pour y ajouter des enfants, dont fera certainement partie Régine Rein. Car celle-ci entre dans le camp de la route de Limoges à Poitiers pour la première fois le lundi 24 mai 1943, (cf. doc ci-dessous) mais nous ignorons encore sa date de sortie.

Les recherches de Paul Lévy sur le camp de la route de Limoges, montrent les conditions dans lesquelles Régine a dû vivre pendant ces jours d’internement dans le camp. Ainsi, nous savons que les internés étaient mal nourris, et vivaient dans l’insalubrité car la plupart des internés étaient recouverts de poux.

De plus, les moyens du camp ne permettaient pas l’achat de nouveaux vêtements, justifiant par là le fait que les internés avaient des vêtements en loques et sans chaussures, malgré l’aide des Secours nationaux. Économiquement le camp devait recevoir un budget (en 1941) du ministère de l’intérieur pour les Nomades et les expulsés hébergés, d’après le ministre des Finances, qui est venu après que le camp eut fait une demande de crédit. Par ailleurs, deux mois après la visite, les crédits ne sont toujours pas versés, et le camp est attribué au compte spécial 38.05 désignant “le service des frais d’occupation”. Toutefois le camp de la route de Limoges, recevra l’aide du Père Fleury et du rabbin Elie Bloch. C’est d’ailleurs le Père Fleury qui enseignera à la classe ouverte dans le camp en 1941, pour les enfants Juifs et Tsiganes, cette classe comprenait tous les niveaux, sans matériel à disposition. En 1943, même si les rapports officiels indiquent le contraire, la classe n’est plus accessible aux enfants juifs. Régine Rein n’a donc pas pu bénéficier de l’enseignement du père Fleury étant entrée en mai 1943.

IV/ L’U.G.I.F (Union Générale des Israélites de France)

Par le biais des préfectures et de la Gestapo, tous les Juifs se voient obligatoirement être affiliés à l’U.G.I.F. Toutes les associations juives préexistantes sont dissoutes. L’U.G.I. F, possède ses propres maisons d’enfants, créées les 16 et 17 juillet 1942 au moment de la Rafle du Vel d’Hiv. Les enfants « libérés » des camps de Drancy, Pithiviers, Beaune-la Rolande, Poitiers, doivent alors être placés dans les centres de l’U.G.I.F., Régine fait partie de ces « enfants bloqués », confiés à l’U.G.I.F. Leurs noms sont consignés dans un registre de police spécial: ces libérations toutes particulières étaient en réalité fictives. Ces enfants ne pouvaient être confiés qu’aux centres de l’UGIF et la décision de ces placements revenait aux autorités allemandes. Ces enfants étaient notamment sous le contrôle des Allemands mais également de Vichy. Ils sont ensuite répartis selon les différents centres: Louveciennes, l’orphelinat Rothschild, la pension Zysman à La Varenne, à Saint-Mandé, Neuilly, Paris, rue Vauquelin et rue des Rosiers à l’École du Travail et également à Montreuil.

Régine était l’une des enfants juifs de la Maison d’Enfants à Louveciennes l’un des nombreux centres gérés par l’U.G.I.F. . Avant son transfert au centre de Louveciennes (Orphelinat agricole de Voisins), Régine est placée dans la maison d’enfants « La Sansonnerie » à Migné-Auxances (86).

Tout comme les autres centres de l’U.G.I.F., Louveciennes accueille en toute sécurité d’abord les enfants des familles juives persécutées. Louveciennes était une maison particulièrement surpeuplée et pauvre. Comme la plupart des centres de l’U.G.I.F., les ressources étaient limitées, mais le personnel des centres faisait tout pour les enfants, afin qu’ils soient soignés, nourris et en sécurité.

Denise Holstein (en bleu, Régine est en rouge), 17 ans, avait fait partie du personnel du centre de Louveciennes.

Après que les Allemands eurent réquisitionné l’orphelinat, les enfants ainsi que le personnel déménagent le 1er janvier 1944 dans une grande villa au n°18 rue de la Paix où ils seront arrêtés, le 22 juillet suivant.

Aloïs Brunner, commandant du camp de Drancy ordonne la rafle des centres de l’UGIF hébergeant des enfants juifs, par représailles, après l’échec de l’attentat contre Hitler le 20/07/1944 et à la suite de nombreuses actions résistantes en France. La nuit du 21 au 22 juillet 1944, la Gestapo mène une rafle sur les foyers d’enfants de l’U.G.I.F. Ces maisons contenaient les enfants de Juifs français, dont la plupart avaient déjà été déportés et assassinés. Dans cette répression, huit maisons d’enfants ont été perquisitionnées. Les résidents et le personnel ont été emprisonnés et expulsés. Au cours de cette action, plus de trois cent cinquante enfants innocents ont été arrêtés.

Les enfants de Louveciennes furent réveillés à l’aube, forcés de quitter leur lit et d’attendre les voitures de la Gestapo. Le directeur de la maison, Monsieur Luoy, et sa famille ont également été arrêtés, mais ils seront libérés plus tard. Quarante et un enfants de Louveciennes ont été placés en détention ; le lendemain, sept enfants ont été déportés à Bergen-Belsen, où ils ont finalement survécu à la guerre.

V/ Sa déportation à Drancy puis Auschwitz

Les enfants partent vers une destination inconnue : Drancy, le camp du lieu de départ du convoi 77 où Régine est internée le 22 juillet 1944. Son matricule dans le camp de Drancy était 255524. Elle est assignée à l’escalier 7, chambrée du premier étage, elle est par la suite déportée sans retour vers Auschwitz par le convoi n° 77 du 31 juillet 1944, tous ont été tués (gazés) à leur arrivé sauf Denise Holstein, Régine Sokol et Georgette Zuckermann l’une des 5 moniteurs. Régine meurt le 3 ou 5 août 1944, à l’âge de 7 ans à Auschwitz (voir acte disparition).

Trente-trois jeunes enfants ont été assassinés à leur arrivée. Une seule adolescente, Denise Holstein, a survécu pour raconter l’histoire de la maison des Louveciennes : sur la rampe de Birkenau, un déporté « sonderkommando » vient lui parler et lui conseille de ne pas prendre d’enfants avec elle : elle échappe ainsi à la mort, contrairement aux 32 enfants de Louveciennes qui furent envoyés directement à la chambre à gaz.

Ainsi, le 31 juillet 1944 à moins d’un mois de la libération de Paris, un des plus importants convois de déportation des Juifs de France quittait Drancy en direction d’Auschwitz. Ce convoi 77 était composé de 1300 personnes dont 300 enfants, arrachés pour la plupart aux maisons d’enfants en région parisienne, de l’Union Générale des Israélites de France (U.G.I.F.) ; « Les Juifs, qui ont travaillé pour l’UGIF, ont pensé pouvoir sauver des Juifs et ils ont compris bien plus tard, et lorsque c’était en général trop tard, que l’UGIF s’est révélé être un piège pour une certaine partie, de ceux qui ont été accueillis » a expliqué Antoine Vitkine.

En complément :

 

This biography of Régine REIN has been translated into english.

Contributeur(s)

Biographie réalisée par des élèves de Terminale du lycée Victor Hugo de Poitiers, sous la direction de leur professeur Cédric Germain.

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