Esther SAYAG (épouse FABRE jusqu’en 1946)
Notre travail sur la vie d’Esther a commencé avec ce message:
« Chère professeure,
Nous ne savons presque rien sur Esther FABRE, comme vous le verrez sur ce seul document. Cependant, cette personne a survécu, comme ma mère, Régine SKORKA JACUBERT, dont vous pourrez lire la biographie sur notre site. Leurs parcours parallèles peuvent vous aider.
Nous vous invitons également à consulter le Mémorial de la Shoah.
Je reste à votre écoute et à votre disposition
Serge JACUBERT »
Après une année de recherche et de travail, nous avons pu retracer la vie d’Esther Sayag. Nous vous souhaitons une bonne lecture.
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Enfance à Oran
L’histoire d’Esther commence dans la belle ville d’Oran, un jour de septembre 1906.
Plantons le décor.
Au nord-ouest de l’Algérie, l’eau translucide de la mer Méditerranée vient s’écraser dans un bruit sourd contre les coques de bateaux amarrés au port. Remontant le long des ruelles enchevêtrées, les relents d’humidité marine se mêlent aux douces odeurs des plats préparés par les femmes, fumets délicats qui s’envolent par les fenêtres entre-ouvertes ourlées de persiennes aux couleurs vives. Des enfants jouent, se courant après, filant comme des courants d’air, entre les bâtisses de la vieille ville.
Au détour d’une rue, on peut tomber nez à nez avec un marchand ambulant, ses mains fixées, comme collées aux poignées de son chariot, au dessus duquel se trouve inscrit, en lettres colorées le mot يانصيب (Loterie), signe multicolore fait pour attirer le regard des passants.
Une fois sur l’une des nombreuses places d’Oran, il reste quelques heures afin de vendre ses billets avant de reprendre son chemin. Les roues des chariots, celles des charrettes, le fer des sabots, tout cela claque sur les dalles aux tons chauds et aux motifs traditionnels. Quelques rares grains de sable se faufilent entre les jointures des carreaux après s’être envolés de la plage toute proche que délimitent d’élégants palmiers. On entend dans les rues de nombreuses discussions.
C’est là, entre la rue de Ratisbonne et la rue de Fleurus, dans le quartier autour de la synagogue, que naît Esther Sayag le 3 septembre 1906.
Esther est la cinquième des six enfants de Yamine Sayag et Fortunée Bentilola. Lorsqu’elle naît, ses parents sont trentenaires et déjà entourés de quatre enfants, deux filles et deux garçons. Deux ans après Esther, la petite dernière, Alia, viendra agrandir la fratrie.
Yamine Sayag est un marchand de légumes et épicier prospère. Les quatre filles et les deux garçons occupent à plein temps leur mère qui reste à la maison pour prendre soin de sa famille. Les parents d’Esther se sont mariés devant le rabbin, ce qui explique qu’ils soient notés comme célibataires sur son acte de naissance.
Jeunesse française
Yamine Sayag meurt peu de temps après la naissance d’Alia. La mère Fortunée n’a pas le choix : elle émigre avec ses enfants vers la métropole et s’installe à Marseille où vit son père qui est commissaire priseur et fonctionnaire. Ce déracinement est difficile.
La famille n’a pas de moyens, ils vivent à la charge du grand-père et les enfants sont encore jeunes. A cela s’ajoutent les échos de la Première Guerre mondiale qui, heureusement, ne touche que peu Marseille.
Les années 1920 sont plus heureuses. La famille déménage à Paris et les filles se marient les unes après les autres. Esther se marie le 29 octobre 1927, à peine quelques jours après sa majorité.
Vivre la guerre
Lorsque la France entre en guerre en 1939, Esther et son mari Jean-Baptiste Fabre ne sont pas particulièrement inquiets. Et lorsque Philippe Pétain est nommé Président du Conseil (équivalent du Premier ministre) le 16 mai 1940, beaucoup de Français sont contents de voir arriver un héros de la Première guerre mondiale qui a toutes les chances de faire gagner la France.
Le 17 juin, l’armistice est demandé et le 10 juillet, la majorité des députés réunis à Vichy donnent les pleins pouvoirs à Pétain. La France est occupée par l’Allemagne nazie. Philippe Pétain met en place un régime autoritaire et commence à collaborer dès le 30 juillet 1940 avec l’Allemagne d’Hitler.
Le décret Crémieux est supprimé le 7 octobre 1940 par une loi de l’État français, le nouveau régime de Pétain. La France a conquis l’Algérie entre 1830 et 1870. A partir de 1870 le décret Crémieux (du nom d’Adolphe Crémieux) donne un nouveau statut aux « israélites indigènes » d’Algérie, soit près de 35 000 juifs (dont la famille d’Esther). Pour en profiter, ils doivent accepter d’abandonner les règles de vie religieuses liées au judaïsme. Leurs conditions de vie se sont un petit peu améliorées, leur statut est un peu meilleur mais toujours inférieur à celui des Français de métropole.
Lorsque Pétain décide d’abroger cette loi, toutes les personnes juives et musulmanes d’Algérie se retrouvent sans pays. La famille d’Esther commence alors à s’inquiéter. Mais ce n’est qu’un début. En octobre 1940 « le statut des juifs » est publié : ils sont recensés c’est-à-dire listés.
En 1941, peu à peu les juifs n’ont plus le droit d’être médecins, politiciens ou même d’aller à l’école en tant que professeur ou même comme élèves. Sur les cartes d’identité, il y a un tampon avec la mention : « Juif » ou « Juive ».
Et à la fin de 1941, tous les juifs et étrangers apatrides entrés en France après 1936 sont internés. Dans le Sud, beaucoup d’étrangers sont enfermés au camp des Milles que nous avons visité avec notre classe. Dans la région parisienne, c’est à Drancy qu’un camp d’enfermement va être créé. Nous en reparlerons plus tard.
Pour la famille d’Esther, la situation devient dramatique. Son beau-frère Robert Mercante, le mari d’une de ses deux sœurs aînées, Rachel, est arrêté, enfermé à Drancy et déporté à Auschwitz par le convoi n° 3 du 22 juin 1942. il y sera assassiné le 24 juillet de la même année.
A partir de là, Esther va aider les membres de sa famille à se cacher. Après quelque temps, elle-même s’en va s’installer à Marseille.
C’est sa nièce, Danielle, qui nous a raconté cela.
Un cousin et deux cousines d’Esther, Roger, Édith et Renée, beaucoup plus jeunes, ont été envoyés en Bourgogne et cachés durant toute la guerre.
En juillet 1942, la police française mena une rafle dans le 10ème arrondissement et de nombreux Juifs étrangers furent arrêtés et déportés dans des camps de concentration. Gidalia et Simha Zavarro, un oncle et une tante d’Esther demandèrent à Monsieur Baccary, instituteur à l’école primaire de leurs enfants, de les prendre pour les mettre à l’abri. Voyant que la situation empire, Monsieur Baccary installe les enfants dans sa maison de vacances où sa femme et sa fille s’en occupent. André Baccary fit des faux papiers et inscrivit les enfants à l’école du village, ce qui les protégea. Cet acte de bravoure et de compassion fit que la famille Baccary a été reconnue comme « Justes parmi les Nations ». Un titre qui est décerné aux gens qui ont sauvé des personnes juives de la mort pendant la Shoah.
En novembre 1942, les nazis décident d’occuper tout le territoire mais Esther réussit à échapper aux rafles et reste à Marseille, où elle travaille comme modiste.
Elle a frôlé la mort plus d’une fois. En effet, au début de l’été 1944, devant la progression des forces alliées, des milliers de juifs sont acheminés à Drancy depuis les villes du Sud, dont Marseille où se cache Esther, pour être déportés. Elle finit cependant par être prise lors d’une rafle à l’été 1944 et transférée au camp de Drancy le 24 juillet 1944.
Internement au camp de Drancy
A l’origine, cet ensemble d’immeuble situé à environ 30 km de Paris est conçu afin d’y loger des populations précaires à bon marché.
En Juillet 1940, la Wehrmacht a réquisitionné le lieu.
La cité sert de camp de détention provisoire pour les prisonniers de guerre français et anglais. En 1941, alors que le bâtiment est encore inachevé, le lieu est transformé en camp d’internement pour les juifs étrangers, puis pour les juifs Français. Il faut dire que le bâtiment s’y prête facilement : construit sur 4 étages autour d’une cour d’environ 200 mètres de long sur 40 mètre de large, il est alors entouré de 2 rangées de barbelés et d’un chemin de ronde, tandis que des miradors sont installés à ses angles.
Pendant 3 ans il reste le principal lieu d’internement avant la déportation de juifs depuis la gare du Bourget (de 1942 à 1943),
puis depuis la gare Bobigny (de 1943 à 1944) vers les camps d’exterminations nazis, principalement vers Auschwitz.
En 1942, alors que les rafles se multiplient, les arrestations sont massives, notamment à Paris. Le camp compte jusqu’à 800 000 détenus en transit, avant le transfert vers les camps de déportations allemands.
Les conditions de vies sont particulièrement difficiles, les conditions d’hygiène déplorables, la faim permanente. Des photos de propagande du camp de Drancy sont diffusées. On y montre des internés heureux…
Le convoi n° 77 dans lequel Esther embarque le 31 juillet 1944 est le dernier convoi de déportation de juifs à partir du camp d’internement de Drancy.
Déportation à Auschwitz – Kratzau
Le 31 juillet 1944, les internés sont réunis dans la cour et on leur annonce qu’ils vont partir pour ailleurs.
Devant la file de wagons du convoi 77. Esther s’avance et avant d’entrer à son tour dans le train, elle regarde en arrière une dernière fois. Des enfants séparés de leurs parents, des femmes et des hommes s’embrassent avant d’être montés dans différents wagons. Avec elle, une soixantaine de femmes et d’enfants entassés dans un wagon à bestiaux étroit avec juste un seau en métal rouillé pour uriner. Sans nourriture ni eau, tous savent que certaines personnes risquent de mourir avant d’arriver à Auschwitz. Esther ne voit plus rien, elle a peur de voir sa mort arriver maintenant, sans revoir sa famille, ni ses amis. Elle savait le risque qu’elle courait à les aider, mais elle a préféré se mettre en danger pour les sauver. D’autres femmes sont hissées de force et entassées dans le wagon. Aucune ne cherche à s’asseoir : de toute façon il n’y a pas suffisamment de place. On ferme le wagon derrière les dernières arrivées et quelques minutes plus tard, le convoi démarre. Esther attend, debout. Le train est parti pour Auschwitz.
Au bout de deux ou trois jours de trajet (les heures se mélangeaient, plus personne n’avait la notion du temps) le train s’arrête.
Les femmes sont tirées en dehors du wagon, mises en rang, examinées et triées comme des objets. Esther voit partir les plus vieilles. Elle ne sait pas encore qu’elles seront assassinées mais elle devine que leur destin est déjà décidé.
Esther est emmenée avec d’autres jeunes femmes dans une pièce. On leur demande de se déshabiller, là devant tout le monde, et d’entrer dans une douche collective. Une eau grisâtre leur tombe dessus et les trempe jusqu’à l’os.
Après la douche, les femmes sont tatouées sur l’avant-bras. Esther voit se former les chiffres 2 5 6 6 1 en grimaçant de douleur. Elle est ensuite poussée sans ménagement devant une grosse pile de vêtement et on lui hurle de se rhabiller !
Elle se retrouve dans un baraquement qu’on appelle un bloc : les lits sont des planches en bois, il n’y a ni drap, ni coussins, ni matelas. La chaleur étouffante passe à travers les murs car on est en plein mois de juillet et elle découvrira que le froid s’infiltre de la même façon en hiver.
En regardant sa carte de rapatriement, 7 nous avons constaté qu’elle avait été transférée à Kratzau.
Nous avons appris en regardant les biographies d’autres déportées qu’à Kratzau il y avait des usines d’armement où travaillaient les déportées. Certaines racontent qu’être dans un bâtiment en dur était un luxe. D’autres expliquent qu’elles espéraient que le camp serait bombardé. Cela mettrait fin à leurs malheurs et créerait des dommages importants à l’avancée des nazis. A Kratzau, Esther a certainement beaucoup travaillé. Elle a maigri, elle a failli mourir plusieurs fois et tout cela l’a fait vieillir prématurément.
Sur son expérience à Auschwitz, Esther ne s’est jamais réellement confiée à qui que ce soit.
Danielle, sa nièce, se souvient simplement que sa tante était terrifiée par les trains. Sa tante a aussi confié à ses sœurs que dans le camps, les déportées se battaient même entre mère et fille pour un petit bout de pain. Cela faisait de la peine et il était très difficile de survivre.
Retour en France
En revenant des camps, Esther toussait, elle était devenue fragile et avait des problèmes pulmonaires.
Elle était très maigre et l’est restée toute sa vie. Ne pouvant pas travailler, elle a vécu grâce à une pension et s’est installée avec sa sœur Jeanne.
Son mariage n’a pas résisté à l’expérience traumatisante des camps. Le divorce est prononcé en 1946.
Elle a passé le restant de ses jours à Paris, vivant avec sa sœur aînée Jeanne, très entourée par sa famille et son chat – enfin le chat que sa nièce Danielle lui avait donné : Charles-Auguste.
Elle est décédée le 26 janvier 1983.
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Au cours de notre travail, nous avons retrouvé la trace de Danielle, la nièce d’Esther qui a été très contente d’apprendre que nous faisions des recherches sur sa tante. Elle nous a confié des souvenirs et des photographies que vous voyez dans cette biographie.
Nous avons réussi à reconstituer l’arbre généalogique de la famille Sayag.
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Présentation du groupe par Hélin :
Nous sommes des élèves de 3ème au sein du collège Émile Thomas, nous nous sommes engagés dans un club nommé « Convoi 77 » où nous apprenons beaucoup de choses sur une période importante du passé. A l’aide de ce club, nous enrichissons nos connaissances sur la Shoah. Ce club est vraiment captivant car cela nous a permis d’acquérir des connaissances, de faire des recherches et de prendre contact avec la famille d’une déportée. Nous sommes curieux et dynamiques et c’est pourquoi ce projet était parfait pour nous. Nous sommes motivés et investis, on a donné le meilleur de nous-même pour parler d’Esther.
Juliette
« J’ai rapidement saisi l’occasion dès que j’ai appris l’existence de ce club. Rechercher des arbres généalogiques, d’anciens papiers (actes de naissance, mariage, etc.) ou encore trouver des numéros de téléphone me rappelle mon jeu favori : « Cluedo ». J’aime m’immerger dans ce genre d’enquêtes qui font ressurgir le passé de notre pays. Cela permet d’enrichir notre culture. L’histoire m’a toujours captivé et petite je rêvais de devenir archéologue. Dans ce projet, l’idée d’honorer la mémoire des anciens me plaît également beaucoup. »
Tayana
« J’ai été très intéressée par ce club car quand j’ai reçu la présentation du projet, j’ai trouvé géniale l’idée d’évoquer un événement aussi intéressant et important en jouant un peu à « Sherlock Holmes ». C’est très original et en plus, le fait de faire des recherches sur la vie d’une déportée permet d’en savoir plus sur l’histoire des Juifs en France ; leur place dans la société de l’époque et les souffrances qu’ils ont endurées durant la Seconde guerre mondiale. »
Marine
« J’ai lu sur un panneau qu’il y avait un club « Convoi 77 » réservé aux 3ème. Cela m’a intrigué et j’y ai été. J’ai adoré la première séance que j’ai trouvée très instructive. Je suis très curieuse de nature et l’idée de chercher par nous-même me plaît beaucoup. Découvrir la vie d’une déportée et la reconstituer est palpitant. On se met au défi de découvrir plus de choses à chaque fois. Ce club est l’occasion de vraiment me cultiver et de savoir davantage de choses sur les déportations. Nous sommes comme des détectives et notre lieu de travail est internet et le CDI. J’adore le fait qu’on tienne un carnet de bord où nous pouvons mettre toutes nos explorations et nos découvertes. J’espère que la famille d’Esther Fabre aimera notre travail, au final. »
Claire
« J’ai été intéressée par ce projet d’abord car cela permet d’apprendre des choses précises que lors d’un cours d’histoire ordinaire. Deuxièmement, retracer la vie d’une déportée est une chose vraiment intéressante que nous ne pouvons pas faire en classe, faute de temps. Le fait que ce club ait lieu sur la pause méridienne est un plus : au lieu de ne rien faire, nous pouvons profiter de ce moment pour nous enrichir et apprendre. »
Téhani
« Mon amie Jade et moi nous sommes venues à ce club car la Seconde guerre mondiale nous intéresse depuis un certain temps. Nous nous intéressons au IIIème Reich et à la manière dont son idéologie a détruit des populations entières. Or les déportations sont un élément central de la politique de la « solution finale ». Ce club est instructif et il nous apprend à faire des recherches et à trouver des informations. Actuellement, nous travaillons à la rédaction d’un texte retraçant l’ambiance qui régnait à Oran au début du XXème siècle, là où Esther Fabre a passé son enfance. »
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Sources:
- Source : ANOM – Archives d’Outre-Mer
- Source : Archives de la ville de Paris
- Source : AJPN – Affichage dans les Bouches-du-Rhône
- Source : Mémorial de la Shoah – MERCANTE Robert
- Source : Yad Vashem France
- Source : Herodote.net + Wikipedia France
- Source : Association Convoi 77
Liens:
- http://anom.archivesnationales.culture.gouv.fr/caomec2/osd.php?territoire=ALGERIE®istre=37829 page 598
- http://tinyurl.com/52s3vw7y page 10
- http://www.ajpn.org//images-comms/1341420236_Recensement-israelites-a-Marseille.jpg
- https://ressources.memorialdorg/zoom.php?code=177242&q=id:p_255249&marginMin=0&marginMax=0&curPage=0
- https://yadvashem-france.org/dossier/nom/11253/
- https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a8/Bundesarchiv_Bild_183-B10919%2C_Frankreich%2C_Internierungslager_Drancy.jpg
+ https://www.herodote.net/16_juillet_1942-evenement-19420716.php
Sources des images :
1 – http://benzaken-descendance.centerblog.net/68-oran-ville-fran-aise-1831-1930
2 – https://www.geneanet.org/cartes-postales/view/217096#0
3 – http://simon.sirour.free.fr/page29/page29.html
4 – http://simon.sirour.free.fr/page2/page2.html
5 – Personnel – Danielle Azerraf
6 – Personnel – Danielle Azerraf
7 – http://www.ajpn.org//images-comms/1341420236_Recensement-israelites-a-Marseille.jpg
8 – https://ressources.memorialdelashoah.org/zoom.php?code=177242&q=id:p_255249&marginMin=0&marginMax=0&curPage=0
9 – https://www.tripadvisor.se/LocationPhotoDirectLink-g1080240-i180742853-Drancy_Seine_Saint_Denis_Ile_de_France.html
10 – https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a8/Bundesarchiv_Bild_183-B10919%2C_Frankreich%2C_Internierungslager_Drancy.jpg
11 – https://www.herodote.net/16_juillet_1942-evenement-19420716.php
12 – https://www.gregoiredetours.fr/xxe-siecle/seconde-guerre-mondiale/annette-wieviorka-et-michel-lafitte-a-l-interieur-du-camp-drancy/
13 – https://www.nbcnews.com/news/world/bookkeeper-auschwitz-oskar-groening-set-stand-trial-n344796
14 – Association Convoi 77
15 – Personnel – Danielle Azerraf
16 – Personnel – Danielle Azerraf
17 – Arbre généalogique réalisé par les élèves.
This biography of Esther FABRE has been translated into English.
إستير صياغ (زوجة فابر إلى سنة 1946)
1906-1983/ الولادة : وهران / الاعتقال : مارسيليا / الإقامة : مارسيليا، وهران، الجزائر
هذه السيرة التي أنجزناها عن حياة إستير بدأت بهذه الرسالة :
« الأستاذة العزيزة، لا نعرف تقريبا أي شيء عن إستير فابر، مثلما سترون في هذه الوثيقة الوحيدة. لكن هذه السيدة عاشت، مثل والدتي، ريجينا سكوركا جاكوبير، والتي يمكن لك قراءة سيرتها في هذا الموقع. فمساراهما المتوازيان يمكن أن يساعداننا. كما ندعوك أيضا للاطلاع على ميموريال المحرقة. وسأظل في انتظار ردك ورهن إشارتك.
سيرج جاكوبير. »
بعد سنة من البحث والعمل، تمكّنا من تتبع حياة إستير صياغ ونتمنى لكم قراءة طيبة.
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طفولة في وهران
حكاية إستير تبدأ في المدينة الجميلة وهران، ذات يوم من شتنبر 1906.
وفيما يلي الحكاية.
في شمال غرب الجزائر، الماء الشفاف للبحر الأبيض المتوسط يأتي ليتكسر في صوت خافت على هياكل السفن الراسية بالميناء. صعودا على طول الأزقة المتشعبة. انبعاثات الرطوبة البحرية تختلط بالروائح الرقيقة للمأكولات المعدّة من قبل النساء، أدخنة طيبة تتطاير من النوافذ نصف المفتوحة والمزيّنة بشبابيك ذات ألوان مشعّة. أطفال يلعبون ويجري بعضهم وراء بعض، مثل تيارات هوائية، بين منازل المدن العتيقة.
في مدار الزقاق، يمكن أن نقع وجها لوجه مع بائع متجول، يداه مسمّرتان كما لو كانتا لاصقتين بمقبضيْ عربته والتي كتبتْ فوقها بحروف ملونة، كلمة « يانصيب » علامة متعددة الألوان صُنعت لتجذب نظر المارّة. وحين تكون في إحدى الساحات العديدة بوهران، تبقى هناك بعض الساعات كي تبيع أوراق اليانصيب قبل مواصلة السير. عجلات العربات المجرورة وصفائح أحذية الخشب، كل ذلك يحدث صوتا فوق الأرضيات ذات الرسوم التقليدية. بعض حبات الرمل تتسرّب بين فتحات مربعات الزليج بعدما تطايرت من الشاطئ جد القريب الذي تحدّه نخلات باسقة. وفي الأزقة تسمع عدة محادثات.
هناك، بين زنقة راتيسبون وزنقة فلوروس، في الحي المحيط بالكنيس، وُلدت إستير صياغ في ثالث شتنبر 1906.
إستير هي الخامسة بين ستة أطفال ليامين صياغ وفورتوني بنطوليلا. حينما وُلدت كان أبواها في الثلاثينيات ولهما أربعة أطفال آنذاك : بنتان وولدان. سنتان بعد ولادة إستير ،جاءت الصغيرة الأخيرة عالية ليكبر عدد الإخوة.
يامين صياغ هو تاجر خُضر وبقّال مستقر. البنات الأربع والولدان يشغلان كل وقت والدتهم التي تتكفّل بعائلتها. تزوج والدا إستير أمام الحاخام وهو ما يُفسر أنهما سُجلا عازبين في عقد ولادتها.
فترة شباب فرنسي
توفي يامين صياغ بوقت قليل على ولادة عالية. فلم يكن للأم فورتوني من خيار : هاجرت مع أطفالها إلى فرنسا واستقرت بمارسيليا حيث كان يعيش أبوها الدلاّل والموظف. كان هذا الاقتلاع من الجذور صعبا عليها.
لا تتوفر للعائلة وسائل عيش. فقد كانوا يعيشون على نفقة الجد والأطفال صغار. يُضاف إلى ذلك أصداء الحرب العالمية الأولى والتي، لحسن الحظ، لم تصب مارسيليا إلا قليلا.
سنوات 1920 كانت أكثر سعادة. رحلت العائلة إلى باريس حيث تزوجت البنات الواحدة تلو الأخرى. تزوّجت إستير في 29 أكتوبر 1927 أياما قليلة على بلوغها.
الحياة إبان الحرب
حين دخلت فرنسا الحرب عام 1939، لم تكن إستير وزوجها جان باتيست فابر قلقيْن بشكل خاص. فحين عُين فيليب بيتان رئيسا للمجلس (ما يعادل الوزير الأول) في 16 ماي 1940، كان كثير من الفرنسيين سعداء وهم يرون عودة بطل الحرب العالمية الأولى والذي كانت له جميع الحظوظ ليجعل فرنسا تنتصر.
وفي يوم 17 يونيو تمّ طلب الهدنة، وفي عاشر يوليوز، منح غالبية النواب المجتمعين في فيشي كامل الصلاحيات لبيتان. احتلّت فرنسا من طرف ألمانيا النازية. وضع فيليب بيتان نظاما سلطويا ونهج أسلوب التعاون منذ 30 يوليوز 1940 مع ألمانيا الهتلرية.
أُلغي مرسوم كريميو يوم سابع أكتوبر 1940 بقانون للدولة الفرنسية، هو النظام الجديد لبيتان. فرنسا كانت قد احتلت الجزائر بين 1830 و1870. وابتداء من 1870 فإن مرسوم كريميو (من اسم أدولف كريميو) منح وضعية جديدة لليهود المحليين بالجزائر، حوالي 35.000 يهودي (ومن بينهم عائلة إستير). وللاستفادة من هذه الوضعية كان عليهم التخلي عن قواعد الحياة الدينية المرتبطة باليهودية. تحسّنت ظروف حياتهم بعض الشيء وتحسّن نظامهم قليلا. لكنه ظلّ دون مستوى ما كان مطبقا على فرنسيي الميتروبول.
وحين قرّر بيتان إلغاء هذا القانون، أصبح جميع الأشخاص اليهود والمسلمين في الجزائر بلا وطن. بدأت عائلة إستير تقلق. ولكن كانت تلك البداية. ففي أكتوبر 1940 نُشر القانون الخاص باليهود، وتم إحصاء المعنيين وتقييدهم في لوائح.
وفي 1941، شيئا فشيئا لم يعد الحق لليهود في أن يكونوا أطباء أو سياسيين أو حتى الذهاب إلى المدرسة لو كانوا أساتذة أو تلاميذ. ووضع على بطائق الهوية طابع يحمل كلمة « يهودي » أو « يهودية ».
وفي نهاية 1941، تمّ سجن جميع اليهود أو الأجانب بلا وطن الذين دخلوا فرنسا بعد 1936.
وفي الجنوب سُجن كثير من الأجانب في معسكر « دي ميل » الذي قُمنا بزيارته مع قسمنا. كما سينشأ في جهة باريس معسكر اعتقال بدرانسي سنتكلم عليه فيما بعد.
بالنسبة لعائلة إستير أصبحت وضعيتها درامية. ألقي القبض على روبير مركانت زوج إحدى أخواتها الكبيرات راشيل وسُجن بدرانسي ثم رُحل إلى أوشفيتز عبر القافلة في ثالث يونيو 1942 . 1942 حيث ستتم تصفيته يوم 24 يوليوز من نفس السنة..
ومنذ ذاك ستُساعد إستير أفراد عائلتها على الاختباء. وبعد فترة سترحل هي بدورها إلى مارسيليا.
ابنة شقيقتها دانيال، هي من حكت لنا القصة.
أما رُوجي، وإديث وروني وهما، تباعا، ابن وبنت خال إستير ، وأصغر منها سنا. فقد أرسلوا إلى بوركون لإخفائهم طوال فترة الحرب.
وفي يوليوز 1942، قامت الشرطة الفرنسية بحملة توقيفات في الدائرة العاشرة حيث اعتقلت عددا كبيرا من اليهود الأجانب ورُحلوا نحو معسكرات الاحتجاز.
طلبت جيداليا وسميحة زافارو، وخال وخالة إستير من السيد باكاري، معلم أطفالهم في المدرسة الابتدائية أن يتكفّل بهم ويضعهم في مكان آمن. لاحظ السيد باكاري أن الوضعية تتفاقم فوضع الأطفال في المنزل الذي يشغله إبان العطل وتكلفت بهم زوجته وابنته. ثم أنجز لهم أندريه باكاري أوراقا مزوّة وسجّلهم بمدرسة القرية وهو ما حماهم. هذا العمل الشجاع والتضامني جعل عائلة باكاري تحصل على صفة « عادل بين الأمم » وهو لقب يُمنح للأشخاص الذين أنقذوا يهودا من المحرقة.
في نونبر 1942، قرر النازيون احتلال كل الإقليم ولكن إستير نجحت في الإفلات من الحملات وبقيت في مارسيليا حيث كانت تشتغل صانعة قبعات.
وقد نجت إستير من الموت أكثر من مرة. وفعلا، ففي بداية صيف 1944، أمام تقدم قوات الحلفاء، وُجه آلاف اليهود من مدن الجنوب إلى درانسي، ومن بينها مارسيليا حيث تختبئ إستير، لكي يرحّلوا. لكن سينتهى الأمر باعتقالها خلال غارة للشرطة في صيف 1944 ونُقلت إلى معسكر درانسي يوم 24 يوليوز 1944.
السجن في معسكر درانسي
في الأصل، صُممت هذه المجموعة من العمارات الموجودة على بعد 30 كلم تقريبا من باريس من أجل إسكان فئات هشة وبثمن زهيد.
في يوليوز 1940، تسلّم الجيش الألماني هذا المكان الذي يُستعمل كمعسكر مؤقت لأسرى الحرب الفرنسيين والإنجليز. وفي 1941، والبناية لم يكتمل بناؤها بعد، تحوّل المكان إلى معسكر لاحتجاز اليهود الأجانب، ثم اليهود الفرنسيين. وينبغي القول بأن البناية تتلاءم بسهولة : فهي مبنية على أربع طبقات حول ساحة من 200 متر تقريبا طولا على 40 متر عرضا، ومُحاطة بصفين من الأسلاك الشائكة وطريق دائري، بينما يوجد برج المراقبة في الزاوية.
وخلال ثلاث سنوات، اعتبر المكان الرئيسي للاحتجاز قبل ترحيل اليهود من محطة البورجي (من 1942 إلى 1943)، ثم من محطة بوبيني (من 1943 إلى 1944) نحو معسكرات التصفية النازية وخاصة نحو أوشفيتز.
وفي 1942، بينما تضاعفت غارات الشرطة، أصبحت الاعتقالات جماعية وبالخصوص في باريس.
يضم المعسكر حتى 800 ألف معتقل عابر، أي قبل نقلهم نحو معسكرات الترحيل الألمانية.
كانت ظروف الحياة جد صعبة، ووضعية النظافة كارثية، والجوع كان دائما. وُزعت صور للدعاية لمعسكر درانسي تظهر معتقلين سعداء.
أما القافلة 77، التي كانت ضمنها إستير يوم 31 يوليوز 1944 فكانت آخر قافلة لترحيل اليهود من معسكر الاحتجاز بدرانسي.
الترحيل إلى أوشفيتز – كراتزو
يوم 31 يوليوز 1944، تجمّع اليهود في الساحة وتمّ إخبارهم بأنهم سيذهبون إلى مكان آخر.
أمام صف عربات القافلة 77، تقدمت إستير وقبل أن تصعد بدورها إلى القطار، التفتت إلى الوراء لآخر مرة. رأت أطفالا انتزعوا من آبائهم، ونساء ورجالا تعانقوا قبل الصعود إلى مختلف العربات. كان هناك مع إستير حوالي ستين امرأة وطفلا مكدّسين في عربة للبهائم ضيقة وبها سطل واحد صدئ للتبول. بدون أكل ولا ماء، يعرف الجميع بأن بعض الأشخاص قد يموتون قبل الوصول إلى أوشفيتز. لم تعد إستير ترى شيئا، كانت تخاف أن يأتيها الموت في تلك اللحظة دون الالتقاء بعائلتها وأصدقائها. كانت تعرف مغبة ما سيصيبها لو ساعدتهم، ومع ذلك فضلت المخاطرة لتقديم المساعدة لهم. نساء أخريات حُملن بقوة وكُدسن في العنبر. لا واحدة منهن فكرت في الجلوس. وكيفما كان الحال فليست هناك أماكن كافية. أُغلقت أبواب العربات وراء آخر الوافدات وبعد دقائق، تحركت القافلة. إستير تنتظر واقفة، وغادر القطار نحو أوشفيتز.
بعد يومين أو ثلاثة من السفر (فالساعات اختلطت، ولا أحد أصبح يدرك مفهوم الوقت) توقف القطار.
جرت النساء خارج العربة ووقفن في الصف، حيث خضعن للفحص والانتقاء كأنما كنّ مجرد أشياء. رأت إستير كيف أن كبيرات السن قد ذهبن. لم تكن تعرف حينها بأنه ستتم تصفيتهن، ولكنها خمنت بأن مصيرهن قد تقرّر.
تم اقتياد إستير مع نساء شابات أخريات إلى غرفة. طُلب منهن إزالة ملابسهن، هناك أمام الملأ، وتمّ الولوج إلى حمام جماعي. نزل عليهن ماء داكن بلّلهن حتى العظام.
بعد الحمام، تم وشْم النساء في الساعد. رأت إستير وهي تتألم تكوين الأرقام على جسدها 25661. دفعت بعد ذلك بعنف أمام كومة كبيرة من الملابس وصرخ فيها بأن تلبس. !
وجدت نفسها في ما يسمى البلوك : الأسرة عبارة عن ألواح خشبية، بلا غطاء للسرير، ولا فراش. الحرارة الخانقة تمر عبر الجدران لأن الشهر كان يوليوز واكتشفت أن البرد كذلك يتسرب بنفس الطريقة في فصل الشتاء.
وبالاطلاع على بطاقة العودة، لاحظنا بأنها نُقلت إلى كراتزو.
وقد علمنا بعد قراءة سير مرحّلين آخرين أنه كانت توجد في كراتزو معامل أسلحة كان يشغّل فيها المرحّلون. تحكي بعض النساء بأن وجودهن في بناية صلبة كان بمثابة ترف.
وصرحت أخريات بأنهن كنّ يأملن أن يُقنبل المعسكر حتى تنتهي مآسيهن، ويُسبب ذلك في أضرار هامة تُعرقل تقدم النازيين.
اشتغلت إستير كثيرا في كراتزو. ضعفت جسديا وكادت أن تموت عدة مرات، وهو ما جعلها تشيخ قبل الأوان.
لم تبُح إستير لأي أحد بتجربتها في أوشفيتز. تتذكر دانيال ابنة خالتها بأنها كانت مرعوبة من القطارات. خالتها باحتْ أيضا لأخواتها بأنه في المعسكرات، كان المرحّلون يتعاركون، حتى بين أم وابنتها، من أجل قطعة خبز صغيرة. كان ذلك يخلق المعاناة، وكان من الصعب جدا البقاء على قيد الحياة.
العودة إلى فرنسا
بعد العودة من المعسكرات كانت إستير تسعل، أصبحت هشة وكانت تعاني من مشاكل في الرئة.
أصبحتْ جد هزيلة وظلت هكذا طوال حياتها. فلم تعد قادرة على العمل، وعاشت بفضل منحة إلى جانب أختها جان.
لم يصمد زواجها لتجربة المعسكرات الصادمة. وتمّ الطلاق سنة 1946. أمضت بقية أيامها في باريس، بالقرب من أختها الكبرى جان، محاطة بعناية عائلتها وقطها – يعني القط الذي جلبته لها دانيال ابنة شقيقتها : شارل-أوغست. وتوفيت إستير يوم 26 يناير 1983.
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خلال إعدادنا لهذه السيرة، استطعنا العثور على أثر دانيال، ابنة شقيقة إستير والتي سعدتْ حين علمتْ بأننا كنا نقوم بأبحاث حول خالتها. وهي من أمدّتنا بذكريات وصور أدرجناها في هذه السيرة، كما استطعنا تركيب شجرة الأنساب لعائلة صياغ.
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إنجاز : تلاميذ الفصل الثالث بكوليج إميل توماس المنضوين في نادي القافلة 77
Bravo ! Beau travail historique et d’écriture…
vive le club « Convoi 77″… en espérant qu’il passe le relais aux élèves des années suivantes.