Albert ROWEK
Albert Rowek est né le 15 juillet 1927, à Nancy. Il habite 59, rue Clodion, à Nancy, un quartier populaire menacé de démolition dès 1920. Aujourd’hui, cette rue n’existe plus sous cette forme. Il est le fils de Joseph Rowek, qui est né à Seidlice (Siedlce, aujourd’hui) en Pologne le 14 janvier 1882.
Synagogue de Seidlice dans les années 1920.
Source, wikipedia.org
Il est d’abord serrurier d’art, métier qu’il exerçait auparavant en Pologne. Puis il devient vendeur en bonneterie au marché de Nancy. Sa mère, sans profession, est également née à Seidlice le 25 janvier 1892. Albert est le dernier d’une famille de cinq enfants. Sa grande sœur s’appelle Estelle [1]. La cadette se nomme Paulette [2]. La benjamine porte le prénom de Fanny. Son grand frère se prénomme Paul.
Ses parents sont venus en France dans les années 1920 à cause de l’antisémitisme très présent en Pologne. Ses cousins, les Rozner, se sont installés à la même époque pour la même raison.
Albert étudie à l’école Raugraff à Nancy. De nombreux autres juifs polonais sont aussi scolarisés dans cette école. Il passe son certificat d’études en 1939.
Albert Rowek, à droite sur la photo, avec ses cousins, Hélène et Armand Rozner pendant la guerre.
Photo extraite de la photothèque du Mémorial de la Shoah, et reprise par le Souvenir français de la Vienne.
Durant la Seconde Guerre mondiale, Albert Rowek et sa famille ont vécu de septembre 1939 au 10 novembre 1939 à Nancy. A partir du 10 novembre 1939, Albert, sa mère et ses trois sœurs sont évacués à Libourne en Gironde. Son père Joseph les rejoint par la suite. Son frère, lui, est arrêté en 1940. La famille est ensuite contrainte de partir vivre à Rouillé dans le département de la Vienne. Dans le courant du mois de Juillet 1941, Albert est arrêté par la Milice puis transféré dans le camp d’internement de la route de Limoges à Poitiers. Il y reste quelques mois et il finit par être libéré entre le mois d’octobre et de novembre 1941 par le Grand Rabbin de Poitiers.
Après sa libération, il est accueilli par sa cousine, son cousin et leurs enfants dans un château à 30 kilomètres de Poitiers. C’est là que les policiers arrêtent ses cousins, le laissant seul avec ses deux petits-cousins. Ils demandent ensuite de l’aide à des paysans qui les hébergent et qui les nourrissent. Le révérend père Fleury les envoie dans une famille catholique chez Mr. et Mme. Gaboriaud, qui abrite déjà huit enfants à l’époque. Albert Rowek travaille chez un fleuriste pendant son séjour jusqu’à ce que la police l’arrête à nouveau à son travail en 1943. Il est alors emmené dans un centre de l’USIF ( Union des Syndicats d’Ingénieurs français) à Paris au centre Lamark.
Carte de sa déportation :
Description de la carte :
Albert Rowek commence sa déportation à la Gare de Bobigny le 31 juillet 1944. Il arrive à Auschwitz-Birkenau, camp de concentration et centre de mise à mort en Pologne, le 2 août 1944. Lors de la sélection, il est transféré pour faire des travaux forcés en tant que menuisier dans le camp de concentration. Il repart le 18 janvier 1945 pour se rendre au camp de concentration de Gross-Rosen en Allemagne à la frontière de la Pologne. Le dernier camp de concentration par lequel il transite est le camp de Buchenwald du 11 avril 1945 jusqu’au 23 avril 1945.
Carte portant le matricule d’Albert Rowek à son entrée au camp de Buchenwald.
Source : edu.convoi77.org
En voyant l’avancée des Soviétiques, les camps de concentration sont en effet évacués et Albert Rowek participe donc aux terribles marches de la mort, d’Auschwitz-Birkenau jusqu’à Buchenwald [3].
Albert Rowek survit. Le 28 avril 1945, il arrive à Paris à l’hôtel Lutetia. Par la suite, Albert est soigné pendant une quinzaine de jours. Il est nourri avec des ampoules de sérum de glucose et termine ses soins dans une maison de convalescence à Jouy-en-Josas.
La famille Gaboriaud l’accueille ensuite à nouveau à Loudun. Il y reste jusqu’en 1949 avant de retourner à Nancy. Albert travaille alors dans la menuiserie la Malora, à Tomblaine, dans la banlieue nancéienne. Malheureusement, son métier ne lui plaît pas. Il décide donc de créer une boutique sur le marché. Il travaille ensuite dans différentes sociétés des environs, sans plus de précision. Il a aussi de nombreux loisirs, comme la boxe ou le théâtre.
Afin de témoigner sa gratitude, il souhaite faire reconnaître sa famille d’accueil Gaboriaud comme « Juste parmi les Nations », une récompense de l’État d’Israël envers ceux qui ont protégé des juifs. Leur nom est alors inscrit sur le Mémorial de Paris et celui de Jérusalem, malgré le refus de sa mère adoptive. Albert Rowek finit par trouver la mort le 21 décembre 2017.
Photo extraite de l’interview d’Albert Rowek, faite le 13 mars 1996.
Voir l’interview en vidéo sur le site vrid-memorial.com
Le 8 mai, jour de la capitulation de l’Allemagne nazie, les élèves participant au Convoi 77 se sont rendus au cimetière du sud de Nancy pour déposer une gerbe en l’honneur d’Albert Rowek. Un article de presse est paru dans le journal « l’Est républicain » à ce sujet.
English Translation download link (PDF)
[1] Née en Pologne, Estelle se prénommait alors Hendla. Son prénom a été francisé.
[2] Comme sa sœur Hendla, Paulette se prénommait Toba en Pologne.
[3] On appelle marches de la mort les convois de prisonniers pendant lesquels les gardiens font avancer les détenus au mépris de la vie de ces derniers, voire en vue de leur extermination.
Bravo pour ce magnifique travail très intéressant !
Cette restitution est passionnante, et merci pour ce bel hommage !
Le matricule de Alfred Rowek a Auschwitz-Birkenau est le B-3899 comme il apparait à coté de son matricule à Buchenwald (129718) sur une des ses fiches de prisonniers disponible sur le site des archives d’Arolsen à
https://collections.arolsen-archives.org/en/document/6963751