Roberte CARACO

1921-1944 | Naissance: | Arrestation: | Résidence:

Roberte CARACO

SUR LES TRACES DE LA FAMILLE CARACO

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LES ORIGINES DES CARACO: UNE FAMILLE VENUE DE TURQUIE

QUELQUES INFOS

La famille Caraco est une famille juive originaire de Turquie. Nous avons appris qu’au XVIème siècle des Juifs séfarades se sont installés dans l’Empire ottoman après avoir été expulsés d’Espagne. La ville de Brousse se trouve par ailleurs sur la route de la soie. La famille Caraco travaillait ainsi dans la sériciculture.
Nous savons que plusieurs membres de la famille Caraco ont quitté la Turquie au début du XXe siècle. Mais nous ne savons si Auriel Caraco et Zimboul Caraco se connaissaient avant ce départ.
Nous n’en connaissons pas non plus les raisons. Economiques? Politiques? Il est certain qu’avec la montée du nationalisme en Turquie à cette période, beaucoup de Juifs ont fait le choix de l’émigration.

Document 1 : Localisation de la ville de Brousse en Turquie, parfois appelée Bursa
Document 2 : Le quartier juif, Brousse, Turquie

 

AURIEL CARACO

Il est le fils de Joseph Caraco et de Zimboul Franco. Il naît le 21 avril 1872 à Brousse, en Turquie.
Il a 2 frères et 2 sœurs: Mazaltov, Raphaël, Elisabeth et Nissim.

ZIMBOUL CARACO

Elle est la fille de Raphaël Caraco et de Sultana Cohen. Elle naît le 15 février 1891 à Brousse, en Turquie. Elle a un frère, Marco et une sœur Rachel.

L’ARRIVÉE EN FRANCE

Grâce au dossier de naturalisation, la première trace qu’on a d’eux en France est celle d’Auriel Caraco à Lille en 1905 où il reste un an. Comment est-il arrivé en France? Avec qui? Nous ne le savons pas. Auriel Caraco s’installe ensuite à Paris, dans le XIème arrondissement où vit une communauté juive importante. Il réside au 9 rue Pasteur de 1906 à 1912, puis au 74 rue Sedaine de 1912 à 1915 et enfin au 6 rue de Belfort.

LE MARIAGE

Zimboul Caraco et Auriel Caraco se marient le 12 octobre 1920 dans la mairie du XIe arrondissement. C’est principalement dans ce quartier de Paris qu’ils passeront leurs vies.

UNE FAMILLE JUIVE DANS LE XIE ARRONDISSEMENT DE PARIS

LES NAISSANCES DES ENFANTS A PARIS

  • Roberte Suzanne naît le 16 novembre 1921 dans le IXe arrondissement, au domicile de sa tante maternelle Rachel Caraco, épouse de Michel Tchacon.
  • Joseph naît le 1er juillet 1923 dans le IVe arrondissement.
  • Isaac naît le 26 décembre 1925 dans le XIIe arrondissement.

6 RUE DE BELFORT

Depuis 1919, la famille Caraco vit principalement à cette adresse comme l’attestent les recensements de 1926, 1931 et 1936. Les enfants sont scolarisés dans les écoles du quartier, Roberte au 144 rue de la Roquette et les garçons à l’école de la rue des Boulets. Grâce à l’acte de recensement de 1936, on sait que les parents de Zimboul Caraco vivent avec eux à cette période.
Grâce au dossier de naturalisation, on a appris que le frère d’Auriel, Mazaltof est en Turquie, et les autres en France, Nissim et Raphaël à Paris et Esther à Marseille. Du côté de Zimboul Caraco, tous sont installés à Paris. Son père meurt en 1936. Sa mère, son frère et sa soeur échapperont à la déportation et aux centres de mise à mort.

OBTENTION DE LA NATURALISATION LE 14 MAI 1929

Auriel Caraco entreprend des démarches pour que lui et les membres de sa famille obtiennent la nationalité française au nom des années passées en France et du fait que ses enfants y soient nés. Depuis la loi du 10 août 1927 la naturalisation est simplifiée pour faciliter l’intégration des immigrés. Aussi la durée de résidence est réduite à trois ans pour obtenir la nationalité française. Auriel Caraco est convoqué à plusieurs reprises avant d’obtenir leurs naturalisations. Il se rend aussi auprès du juge de paix dès 1926 pour la naturalisation des enfants. Auriel et Zimboul Caraco sont naturalisés par décret du 14 mai 1929.

LES MÉTIERS DES PARENTS

Auriel Caraco exerce de nombreux métiers. On lit qu’il est voyageur, marchand ambulant, employé, électricien … De 1914 à 1918 on sait qu’il est marchand de lampes électriques au 97 boulevard Voltaire à Paris. En 1928, il déclare être gérant d’un débit de vin-restaurant gagnant 250 francs par semaine. Ce débit sera par la suite vendu. On sait aussi que la même année il doit se rendre en Turquie car il y a encore des intérêts. Il cesse toute activité en 1940 et perçoit une pension de 6000 francs accordée au tire de “vieux travailleur”. Zimboul Caraco est sans profession et donc mère au foyer.

Acte de mariage de Zimboul et Auriel Caraco

Acte de naissance de Roberte Suzanne Caraco

Acte de recensement de 1936

Extraits du dossier de demande de naturalisation

Document 1 : Décret de naturalisation d’Auriel Caraco, 1929
Document 2 : Décret de naturalisation de Zimboul Caraco, 1929

ZIMBOUL CARACO, PREMIÈRE DÉPORTÉE

L’ARRESTATION

Zimboul Caraco est arrêtée au domicile familial le 31 décembre 1943. Des scellés sont posés par les autorités allemandes sur l’appartement. En novembre, le gouvernement de Vichy avait demandé aux préfets de leur fournir la liste de tous les juifs français qui jusqu’alors n’étaient pas inquiétés. Par ailleurs, lors de la visite du Mémorial de la Shoah à Paris, nous avons consulté deux fiches de recensement, l’une en 1940 et l’autre en 1941, concernant Zimboul et sur lesquelles il est fait mention de sa judéité, de sa situation familiale et professionnelle, et de son lieu de domicile. Après son arrestation, elle est d’abord emmenée à la prison du XIe arrondissement avant d’être internée dans le camp de Drancy où elle arrive le 1er janvier 1944.
Sur sa fiche d’internement, on apprend que son matricule est le 10650, qu’elle est au 3ème étage, au 9ème escalier et qu’elle doit être déportée immédiatement (mention B).

L’ARRIVÉE ET LA MORT À AUSCHWITZ

Zimboul Caraco est déportée le 20 janvier 1944 vers le camp d’Auschwitz par le convoi 66. Lors de la visite de la gare de Bobigny, nous avons appris que les déportés étaient souvent levés à 4 heures du matin.Un appel était fait, on les comptait. Puis à 6 heures ils partaient de Drancy en autocar pour la gare de déportation, qui était avant celle du Bourget. Avant leur montée, ils étaient à nouveau comptés. Les trains arrivaient souvent la veille, ils étaient inspectés par des internés qui n’allaient pas être déportés afin d’éviter tous risques d’évasion. Une fois arrivés, on expliquait d’ailleurs aux déportés que si quelqu’un s’échappait il serait fusillé et son corps mis dans le wagon. Zimboul Caraco meurt le 25 janvier 1944. Avec l’aide d’un document nous pensons que c’est du fait de son âge qu’elle est exterminée quasiment dès son arrivée à Auschwitz. Elle a 52 ans.

Document extrait du dossier de demande de naturalisation. On y apprend l’arrestation de Zimboul Caraco entre autres

Registre de le prison où est enfermée Zimboul Caraco avant son internement à Drancy

Liste des déportés: on y voit le nom de Zimboul Caraco et son matricule au camp de Drancy

Carnet de fouille de Zimboul Caraco, à son arrivée au camp de Drancy

 

AURIEL CARACO, DÉPORTÉ À AUSCHWITZ

SON ARRESTATION

Nous ne savons pas pourquoi Auriel Caraco, ses enfants Roberte et Isaac ont échappé à l’arrestation du 31 décembre 1943 et ce qu’il devient après celle de sa femme. Dans son dossier de naturalisation, il est écrit que les autorités n’ont pas trouvé non plus traces de lui par la suite, malgré leurs recherches. Il est par ailleurs aussi indiqué que durant la guerre leur naturalisation a été maintenue. Cependant Auriel Caraco finit par être arrêté, mais nous ne savons pas dans quelles circonstances.

L’INTERNEMENT À DRANCY

Auriel Caraco arrive à Drancy le 5 mai 1944. Il reçoit le matricule 21169. Il est installé d’abord à l’escalier 2 au 2ème étage, puis à l’escalier 19 au 4ème étage. Sur sa fiche d’internement nous apprenons par la mention B qu’il doit être déporté immédiatement.

L’ARRIVÉE À AUSCHWITZ

Auriel Caraco est déporté dans le convoi 74 le 20 mai 1944. Les trajets duraient près de 56 heures pour arriver à Auschwitz. Enfermés dans les wagons, les déportés n’étaient que rarement approvisionnés en eau. Selon les saisons, ils souffraient aussi du froid ou de la chaleur étouffante. Auriel Caraco meurt le 25 mai 1944 très rapidement à son arrivée du fait de son âge avancé. Auriel Caraco a en effet 72 ans.

Extrait du dossier de demande de naturalisation

Carnet de fouille d’Auriel Caraco, à son arrivée au camp de Drancy

Liste des déportés: on y voit le nom d’Auriel Caraco et son matricule au camp de Drancy.

Document extrait du dossier de déportation d’Auriel Caraco. On y trouve entre autre une explication à l’extermination dès son arrivée, mais certainement aussi pour son épouse.

ROBERTE CARACO, DÉPORTÉE DU CONVOI 77

ROBERTE SURVEILLANTE DE L’UGIF

Plusieurs sources nous apprennent que Roberte Caraco était surveillante à l’UGIF. Elle habiterait dans le même quartier que ses parents mais au 19 rue Popincourt. Avant la Seconde Guerre mondiale un petit train reliait la place de la Bastille à la Varenne Saint-Hilaire.
Il favorisa l’installation de maisons d’enfants orphelins, le long de la Marne. Pendant la guerre, les enfants juifs y étaient accueillis dans des meilleures conditions que dans la capitale. Sous le contrôle allemand, l’UGIF tente de soustraire les enfants dont les parents avaient déjà été déportés. Encadrés par des adultes dévoués, juifs eux mêmes, les enfants avaient pu être cachés entre 1942 et 1944 dans des lieux plus sûrs. C’est ce qu’on appelait les enfants “LIBRES” car leurs parents n’étaient pas sur les listes. Les autres enfants dont les parents étaient fichés étaient les enfants “BLOQUES”.

LA RAFLE DE LA VARENNE SAINT-HILAIRE

Grâce à son dossier de déportation, nous savons que Roberte Caraco a été arrêtée lors de la Rafle de la Varenne Saint-Hilaire. Le 22 juillet 1994, sous les ordres du SS Aloïs Brunner, des nazis et des collaborateurs organisent l’arrestation des 28 enfants âgés de 4 à 11 ans de la pension Zysman et de l’orphelinat Beiss Yessoïmim, au 30 rue Saint-Hilaire, à La Varenne. Des personnels encadrant, dont Roberte, ne les abandonnent pas et les accompagnent jusqu’à Drancy et Auschwitz, là où ils seront tous exterminés.

L’INTERNEMENT À DRANCY

Du 23 au 30 juillet 1944 Roberte est internée au camp de Drancy sous le matricule 25622. On apprend qu’elle est célibataire et doit être déportée immédiatement. Elle est installée au 3ème étage à l’escalier 8.

L’ARRIVÉE À AUSCHWITZ

Roberte Caraco est déportée le 31 juillet 1944 par le convoi 77 pour Auschwitz. Elle y meurt le 5 août 1944, soit peu de temps après son arrivée. Nous supposons qu’elle est tuée aussitôt car elle n’a sans doute pas voulu se séparer des enfants de l’UGIF qu’elle accompagnait. Elle a alors 22 ans.

“CETTE PEUR QUI NOUS ETREIGNIT, CETTE PANIQUE QUI MONTAIT EN NOUS”

Nous n’avons aucune trace de Roberte Caraco, ni document écrit, ni photo d’elle ou de quelconque membre de sa famille. Le portrait du début du diaporama a été réalisé par l’artiste H3llly et fruit de son imagination. Charlotte Schapira a été déportée dans le même convoi et est revenue. Elle témoigne dans “Il faudra que je me souvienne” par cette phrase :

Plan du camp d’internement de Drancy

Liste des déportés: on y voit le nom de Roberte Caraco

 

JOSEPH CARACO, SURVIVANT DE LA SHOAH

SON ENFANCE

Le 1er juillet 1923 Joseph Caraco est né au 11 rue Castex Paris IVe à 15 heures au domicile de ses parents. Il est scolarisé dans les écoles du quartier (comme celle du 129 rue des Boulets). Dans un des registres il est précisé qu’il est “indiscipliné, avec un mauvais état d’esprit”. Il a eu le CEP et il est indiqué qu’en sortant du primaire il suit un cours complémentaire industriel à Trousseau.

JOSEPH CARACO PENDANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE

Il vit au domicile familial. Il n’aurait pas été soldat. Il aurait été ouvrier, même si on le dit aussi étudiant. Et il aurait travaillé au service du courrier des armées. Là il se fait prendre pour vol : On l’accuse d’avoir caché un paquet dans son pantalon. Il ne nie pas les faits mais prétend que ce n’était pour lui, sans accuser la personne concernée. Il est condamné le 16 février 1943 par le tribunal allemand à six mois de prison. Il est d’abord incarcéré à la prison du Cherche-Midi avant d’être envoyé à celle de Troyes. Il n’y a pas de raison particulière à ce transfert si ce n’est le nombre de places dans les prisons. Là on lui propose au bout de trois mois une remise de peine pour bonne conduite, à savoir d’accepter d’aller travailler en Allemagne un an. Il sort le 6 mai 1943 de la prison de Troyes. Un dossier médical nous fait penser qu’il serait arrivé en Allemagne le 16 mai 1943. On ne sait pas quand et comment il revient ensuite en France.

SA VIE APRÈS LA GUERRE

Il se marie à Odette Gendro. Nous avons appris via un site de généalogie qu’à la mort de son épouse, il aurait confié leur fille à sa grand-mère maternelle. Il aurait eu une vie de marginal.
Il décède le 6 juillet 1987 à Maison Alfort.

Registre de naissance

Document extrait du dossier fourni par la Préfecture de Police attestant de l’arrivée en Allemagne pour y travailler

Documents extraits du dossier fourni par la prison de Troyes

 

ISAAC CARACO, SURVIVANT DE LA SHOAH

SA VIE JUSQU’EN 1945

Isaac Caraco est né le 26 décembre 1925 à Paris dans le XIIe arrondissement, dans une maison d’accouchement. Il est scolarisé dans l’école du quartier, comme son frère. Il vit au domicile parental. Il est électricien et travaille pour les Usines Amilcar à Boulogne avec un salaire de 7f50. On ne sait pas pourquoi il n’est pas arrêté en même temps que sa mère le 31 décembre 1943 ni pourquoi il ne se fait jamais arrêter ni où il vit pendant tout ce temps et avec qui.

SUR LES TRACES DE SA FAMILLE DISPARUE

Ayant survécu, Isaac se lance dans la recherche de ses parents et de sa sœur Roberte dont il n’avait eu aucune nouvelle depuis la fin de la guerre. Nous avons surtout des traces de cela dans le dossier de déportation de sa sœur. Il est aussi très actif pour leur faire reconnaître certains statuts, comme ceux de “déportés politiques” ou encore pour que soit mentionné sur leurs actes de décès “mort pour la France”.

SA VIE APRÈS LA GUERRE

Isaac vit au 28 rue Lepeu Projetté dans le XIIe à Paris en 1954. Il se marie avec Léa Marie Joseph Le Moulec le 6 novembre 1963 dans cet arrondissement. Ils ont un fils, Christian qui lui-même aura une fille se prénommant Delphine. Isaac retraité est mort le 12 mai 2002 à à Carchaix-Plouguer. Nous avons retrouvé via les réseaux sa petite-fille, mais elle n’a pu nous éclairer sur l’histoire familiale.

Document trouvé dans le dossier de déportation de Roberte Caraco et attestant des recherches entreprises par Isaac Caraco pour retrouver les membres de sa famille déportés.

Extrait d’acte de naissance d’Isaac Caraco délivré par la mairie de Paris (XIIe
arrondissement)

LES SOURCES

  • Archives nationales de Paris (actes de naissance, mariage, recensement, registres d’école…)
  • Archives nationales de Pierrefitte: dossier de naturalisation n° 52164 X 28 d’Auriel CARACO et Zimboul CARACO, dossier conservé aux Archives nationales sous la cote BB/11/10758
  • Archives nationales de Pierrefitte: dossier de naturalisation n° 3714 X 26 des enfants Caraco, dossier conservé aux Archives nationales sous la cote BB/11/9213
  • Service historique de la défense de Caen: Auriel CARACO (AC 21 P 433200 et AC 21 P 249049), Zimboul CARACO (AC 21 P 433208 et AC 21 P 249050) et Roberte Suzanne CARACO (AC 21 P 433204 et AC 21 P 249051)
  • Mémorial de la Shoah
  • Préfecture de police: document sur l’arrestation de Zimboul Caraco (CC2 Registre d’écrou des consignés provisoires au Dépôt (1941-1970))
  • Archives Patrimoine de l’Aube (dossier d’écrou de CARACO Joseph, détenu à la prison des Hauts-Clos de Troyes.)

 

Sur

Contributeur(s)

Biographie réalisée par les élèves de Troisième du collège Pierre de Ronsard à L’Haÿ les roses, sous la direction de leur enseignante, Mme Céline Georges.

Reproduction du texte et des images

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